Version 0.2 du 26.06.2017. (English v0.1 here)
Analyse de Negawatt version 2017
Par Claude Acket et Henri Prévot
Introduction
Comme indiqué dans le titre d’un paragraphe intitulé « La fin programmée des fossiles et du nucléaire », l’objectif du scénario de Negawatt est de ne faire appel, d’ici 2050, ni à l’énergie nucléaire, ni à l’énergie fossile, pour répondre aux besoins de consommation, soit un objectif 100 % renouvelables.
Fossiles et nucléaire sont placés au même niveau d’exclusion. Il faut noter que la sortie totale du nucléaire prévue dès 2035, précédera celle des fossiles, avec zéro nucléaire, mais encore 500 TWh issus des combustibles fossiles à cette date. On voit où sont les priorités : abaisser au plus vite le nucléaire, pourtant source d’énergie qui n’émet pas de gaz carbonique.
Cette transition Negawatt est un pas de géant en considérant la situation actuelle, où mesurée en énergie primaire, la plus grande part (48 %) de l’énergie vient des combustibles fossiles, ensuite du nucléaire pour 42 % et enfin des renouvelables pour environ 10 %.
Negawatt vise ainsi, de passer 10 à quasiment 100, en pourcentage, soit un facteur 10 de croissance pour les renouvelables en valeurs relatives. Mais comme en valeur absolue, il semble impossible d’y arriver, avec une progression limitée à un facteur 3, (la nature a des limites que la meilleure idéologie ne peut vaincre), il faut impérativement y associer une forte baisse de la consommation.
L’association Négawatt présente ce scénario comme quelque chose de « réalisable, avec des bénéfices multiples pour la santé et l’environnement, riche en emploi et un bienfait pour l’économie ». De multiples affirmations que nous allons examiner.
Negawatt aborde, à juste titre en première urgence, la lutte contre le changement climatique, et nous ne pouvons, au nom de Sauvons le Climat, qu’être d’accord, sur le même constat, et l’absolue nécessité de viser une réduction des rejets du gaz reconnu comme l’un des principaux acteurs de l’effet de serre : le gaz carbonique. Au niveau européen, l’objectif de cette réduction est d’une division par 4 d’ici 2050. Negawatt, en arrivant à facteur de l’ordre de 330 (si l’on se base sur les derniers « symboliques résidus »de charbon et de pétrole encore utilisés) veut montrer que l’on peut faire aisément encore plus.
Mais, pour ce, à côté d’actions de sobriété, d’efficacité énergétique et de développement des énergies renouvelables, Negawatt annonce : « après le choc de Fukushima, ce sera un avenir électrique sans nucléaire ». Si nous ne pouvons que partager, sur l’aspect qualitatif, les actions de limitation de la consommation, nous avons beaucoup de réserves sur l’aspect quantitatif. Il en serait de même pour la promotion des renouvelables, sous réserve que celle-ci vise en premier les renouvelables thermiques et sommes très réservés sur celles électriques.
Cette sortie du nucléaire, prévue totale d’ici 2035, est en fait l’élément moteur du scénario Negawatt, autour duquel tout s’articule, depuis la stricte limitation de la consommation (- 61 % par habitant), jusqu’au fort développement de l’électricité renouvelable électrique, pour quasiment remplacer celle actuelle produite par le nucléaire. Pour réaliser ceci, 76,4 % de la production d’électricité reposerait sur l’éolien et le photovoltaïque, ce qui représente une multiplication par 13,8 de leur production actuelle. A elles deux, avec une production annoncée annuelle de 394 TWh (puissance totale de 217 GW) elles assureraient le quasi remplacement des 404 TWh de l’actuel nucléaire (puissance totale de 63 GW).
Selon Negawatt, ceci serait faisable en dépit de la spécificité de ces deux sources, à savoir leurs caractères intermittents et aléatoires, l’un des points principaux à considérer.
Mais, dès le départ, le choix du nom de baptême Négawatt, montre l’ambigüité. Cela signifie t-il : non au Watt, et en faire la chasse ? Ceci est surprenant, dans la mesure, où le Watt est une unité de puissance, et non représentative des rejets de gaz carbonique, qui ne peuvent s’estimer qu’à partir de l’énergie, dans la mesure, où celle-ci a une origine fossile. Hors, l’énergie ne s’exprime pas en Watt, mais en Joule, ou en Wattheure (1 Wh = 3600 Joules) ou en tep (1 tep = 41,86 GJ). Le Watt, unité de puissance est surtout utilisé pour caractériser les puissances des équipements électriques, et l’on voit de suite apparaître l’ennemi à battre : l’électricité nucléaire.
Ceci conduit à un curieux résultat final, contraire à l’annonce, qui ferait penser : moins de Watt, alors qu’il y en aura beaucoup plus, mais très mal utilisés. En effet, comme nous le verrons, alors que la puissance totale installée des sources d’électricité, qui est, à ce jour, d’environ 127 GW (pour 572 TWh produits), monte dans Négawatt, à 240 GW (pour 462 TWh produits). Voilà un Néga qui se traduit par un Hyperwatt, avec une multiplication par près de 2 !
Faut- il faire la chasse à tout ce qui est électrique, alors que le nucléaire, comme les énergies renouvelables n’en émet pas ? Ainsi, pour l’ensemble du secteur énergie, sur les 380 millions de tonnes de CO2 rejetées annuellement, seulement 10,7 % sont associés à la production d’électricité, et ne représentent, donc, qu’une part réduite comparée aux besoins d’énergie pour la mobilité (39,2 % des rejets associés au quasi seul pétrole) et aux besoins des usages fixes (49,7 % associés à l’emploi du gaz, du pétrole et encore à un peu de charbon).
Il faut rappeler, et ceci est un point crucial, lorsqu’on envisage l’avenir, que la France a déjà fait un premier pas vers la réduction des rejets de gaz carbonique, lors de sa première transition énergétique. Cette transition réalisée, à partir de la fin des années 1970, jusqu’en l’année 2000 (dernière mise en service des 1500 MW de Civaux 2) a vu la production d’électricité produite à partir des combustibles fossiles (essentiellement le charbon) remplacée par le nucléaire. Ceci a aussi été accompagné par une extension très favorable, de l’emploi d’une électricité décarbonée, limitant notamment l’emploi du gaz pour le chauffage. La France est déjà quasiment sortie du charbon. Reste à sortir du pétrole et du gaz.
Cette situation favorable actuelle, du modèle français se traduit, avec des rejets français de gaz carbonique associés à l’énergie de 6,1 tonnes annuelles par habitant, à comparer aux 10,9 tonnes annuelles par habitant en Allemagne, qui débute sa sortie du nucléaire (encore 7,6 % de sa production énergétique primaire, au lieu de 43,8 % en France)
De cet acquit bien palpable, mesurable Negawatt veut s’en débarrasser au plus vite. On efface le passé.
Notre examen du dossier Negawatt 2017
Nous avions en 2011, fait une analyse détaillée du scénario Négawatt 2011 (NgW11). Pour aller plus loin, et arriver à 100 % renouvelables, dans la lignée de l’approche récente de l’ADEME, avec le même intitulé du 100 % renouvelables, mais sur la seule électricité, Negawatt sort sa version 2017 (NgW17)
Si les changements 2011/2017 font passer de 94 TWh à quasi zéro (encore un symbolique résidu de 3.3 TWh), la part des combustibles fossiles, ceci repose déjà sur une baisse accrue de la consommation totale, qui passe de 849 à 806 TWh, amplifiant l’importance de l’ensemble sobriété/efficacité.
Ces changements 2011/2017 concernent surtout un fort accroissement de + 28 % des sources d’électricité renouvelables NRi. Ces sources que Negawatt se refuse à les voir affublées de l’indice i, pour intermittentes, en préférant les appeler variables (ou fluctuantes, dans sa version 2011). Il est vrai que si la puissance produite passe de son maximum, par exemple à 80 % de la puissance installée, ce n’est pas la même terminologie si ne tombe pas à zéro, mais péniblement reste à 5 %. Mais en pratique, cela revient à quasiment zéro.
L’énergie produite par ces deux sources est passé de 284 TWh (NgW11) à 394 TWh (NgW17), en rappelant qu’elles produisent 28.6 TWh en 2015. Ceci conduit, pour prendre en compte la variabilité, à renforcer le power to gaz et la méthanation, multipliée par un facteur proche de 3, entre NgW11 et NgW17, accentuant les questions déjà posées sur la version 2011, autour des électrolyseurs (l’inconnu sur leurs puissances), de l’origine du gaz carbonique et de façon générale les évaluations de rendements et pertes, qui sont, quel que soit le domaine traité, sous estimées.
On notera enfin un changement fondamental, avec l’appel clair et significatif aux pompes à chaleur. Certains watts honnis en 2011 redeviendraient acceptables. On retrouve ici la même démarche que celle de l’ADEME, qui a, en quelques années, effacé son affichage du non aux pompes à chaleur, trop assimilable à l’électricité nucléaire.
La consommation d’énergie :
De 2015 à 2050, selon ce scénario, la consommation d’énergie serait divisée par plus de deux. Cette hypothèse a acquis ses lettres de noblesse depuis que la LTEV (loi sur la transition énergétique), en a fait un objectif. On peut juger, qu’elle n’en demeure pas moins illusoire.
Nota :
– La majorité des données chiffrées, affichées dans ce document sont issues de schémas de Sankey de Negawatt, exprimés en TWh. Négawatt indiquent toutes les quantités d’énergie en TWh (térawattheure), qu’elles soient thermiques ou électriques. Dans notre approche pour sortir des fossiles, avec en premier le pétrole, nous utilisons couramment la tonne équivalent pétrole ou tep (tep : unité non officielle du Système international, mais qui est adaptée pour la transposition avec 1 tep =41,86 Gj, soit 11,63 MWh.° Ceci montre l’accent sur l’importance des combustibles fossiles, et son porte drapeau en tête le pétrole. Ce mode de comptage est en effet, le plus parlant, accessible, avec en référence le pétrole, premier des combustibles fossiles, tant en France que dans le Monde, et un lieu direct avec les autres combustibles fossiles (par exemple en moyenne 1 tonne de houille = ~ 0.62 tep ; 1000 m³ de gaz = ~0,855 tep) toutes sources potentielles de chaleur, que ce soit en usage direct ou pour produire de l’électricité. On verrait mieux utiliser la terminologie Non à la tep. Ceci s’applique de façon équivalente, pour la production directe de chaleur par les renouvelables thermiques (comme la biomasse, le soleil, la géothermie) et permet de faire des bilans globaux chaleur en production, comme en consommation. Par contre pour les renouvelables qui ne produisent que de l’électricité, la transposition ne présente aucun intérêt, et il est préférable de ne parler que de Joule ou de Wh, pour l’énergie et des Watt pour les puissances.
– La lecture conjointe du texte et du schéma Sankey 2050 révèle quelques incohérence, ou difficultés de lecture ou de compréhension. Poste par poste celles-ci portent sur quelques pour cent des données, de même que sur les rendements, allant toujours dans le bon sens pour la démonstration, visant la sortie du nucléaire. Comme elles ne remettent pas fortement en cause les principales conclusions, nous ne les prendrons pas en compte.
La consommation totale d’énergie de Negawatt 2017 (NgW17) passe de 1830 TWh (157 Mtep) en 2015) à 806 TWh (69 Mtep) en 2050, soit – 56 % au total, et ainsi, – 61 % par habitant. Elle était de 74 Mtep pour NgW11. On va encore plus loin dans la sobriété/efficacité.
Les usages se répartissent
– en chaleur pour 33 Mtep (382,4 TWh)
– en mobilité pour 21.6 Mtep (250,8 TWh)
– en électricité spécifique pour 172,8 TWh)
Par secteur de consommation, ces usages se répartissent
– Résidentiel et tertiaire 29,3 Mtep
– Transports 19,4 Mtep
– Industrie 15,8 Mtep
– Agriculture 4,9 Mtep
Pour montrer l’origine de ces gains, NgW 17, les attribue pour 17 % à la sobriété, et 27 % à l’efficacité, soit un total de 34 %. Mais ces gains indiqués se réfèrent non à l’année 2015, mais à un « tendanciel », imaginé, auto créé à sa convenance, par Negawatt pour 2050. Alors que les tendances de tous les scénarios considèrent dans une perspective de semi continuité, en dehors de toute nouvelle politique volontariste dure, guerre, crise économique profonde, une augmentation de la consommation, Negawatt annonce comme base : 1600 TWh pour 2050, soit déjà une baisse d’environ 11 %, masquant l’effort de la transition. Mais il fallait que Negawatt cache l’ampleur de ce qu’il prévoit, ainsi, en apparence il faut se serrer la ceinture d’un cran de moins.
Un vrai tendanciel, hors toutes mesures, visant un objectif spécifique comme réduire la part des combustibles fossiles et les rejets de gaz carbonique, devrait prendre en compte, déjà la simple augmentation de population (ici + 13 %), et en outre, par habitant, un surplus de consommation lié à un accroissement du PIB, pondéré par le facteur d’élasticité. Au total, ce devrait être environ + 30 % et non moins 11 %. Un écart de 40 %, du déjà tout cuit, pour avaler la pilule de décroissance.
Mais tout ceci vise à cacher une partie de la forte décroissance qu’impose Negawatt, que certains baptiseront de bienheureuse, réalisable avec que des bénéfices, et d’autres la nommerons décadente, misérabiliste.
Consommation par le secteur résidentiel et tertiaire
Selon le scénario NgW17, dans le résidentiel et le tertiaire, la consommation totale est de 341 TWh (29,3 Mtep).
La consommation pour les seuls usages thermiques est de 25,1 Mtep. Ils sont actuellement de 54,5 Mtep, ce qui suppose une baisse de 46 %, soit plus qu’un facteur 2 par habitant.
Le scénario prévoit un accroissement de surfaces de 12 % pour le résidentiel (passage de 2500 à 3000 Mm²). Cet accroissement est cohérant avec l’accroissement de population. Il est plus cohérant que NgW11, qui prévoyait la simple stabilisation dans le résidentiel et + 170 Mm² dans le tertiaire.
Negawatt compte beaucoup, sur la mise en œuvre de politiques incitatives, comme : « encourageant par exemple la colocation d’étudiants ou l’hébergement de jeunes travailleurs chez des personnes âgées ». La terminologie est plus atténuée, que dans NgW11, qui était claire sur la « cohabitation recommandée pour les veufs ou veuves », mais il reste l’impératif de se « serrer un peu » dans les logements, en déphasage total, avec les tendances sociétales actuelles, notamment en mettant l’accent sur la cohabitation (plus ou moins forcée), le partage des logements comme ceux des personnes âgées vivant seules…, de nombreuses mesures à la limite de la coercition.
Ceci compte aussi, via la sobriété, sur une baisse des températures de vie, de l’ordre d’au moins 2 °C, qu’il faudrait faire appliquer, avec rassurons nous, la distribution gratuite de pulls.
Ceci repose sur l’efficacité avec en final un gain d’un facteur 5, en kWh/m² par l’isolation . Pour ce, Negawatt retient un volume annuel des travaux sur 780 000 logements et 3,5 % environ des surfaces tertiaires.
Bien entendu, il convient d’isoler le plus de logements, aucun doute sur ce sujet. Mais il faut prendre en compte que ce sont les derniers kWh/m² à gagner, qui coûtent le plus cher. Il faut en voir les limites. Mettre en modèle ces logements « thermos » quasi autonomes, où grâce à la chaleur humaine, on ne gèle pas, est une impasse. Il faut considérer les cas, où l’opération tombe sous un seuil de retour sur investissement inacceptable, et impose des avances en capitaux, que seules les familles aisées pourraient y répondre.
Peut-on faire plus que les 500 000 rénovations par an promises dans le précédent programme électoral à la présidence, qui ne furent loin de là jamais obtenues, mais en fait l’essentiel des aides ont été destinées au développement des sources d’électricité renouvelables, sans aucun gain sur la limitation des rejets de gaz carbonique. Il aurait mieux vallu porter ces aides vers l’isolation des logemnts pour les plus démunis.
Mais élément nouveau, positif enfin, tout n’est pas désespéré, parmi les sources d’énergie, les pompes à chaleur sont mises en avant et couvriraient la moitié des installations de chauffage. Ceci n’était pas prévu dans NgW11. Mais à l’époque, dans la mouvance anti nucléaire, comme à l’ADEME, les pompes à chaleur étaient exclues du langage, car qui disait pompe à chaleur sous entendait électricité nucléaire, absolument à proscrire à l’époque. Les choses ont changé, notamment à l’ADEME, depuis quelques années, et ainsi il est cité dans NgW17, ce qui traduit une évolution idéologique : « une place privilégiée aux pompes à chaleur performantes, principalement électriques, qui disposent d’atouts indéniables en termes d’efficacité et de flexibilité ».On s’écarte enfin du non au Watt.
Les pompes à chaleur représenteraient 50 % du chauffage résidentiel et 35 % du chauffage tertiaire, soit environ 11 Mtep. Sur la base d’un COP moyen de 3 ceci donnerait 7,36 Mtep, tirés de la nature (environnement) et 3,7 Mtep à partir d’électricité, soit 42,7 TWh à produire.
L’électricité directe étant pratiquement ramenée à zéro (environ 0,5 Mtep), les autres sources d’énergie pour la chaleur de l’ensemble résidentiel et tertiaire sont
– la biomasse pour environ 6 Mtep (30 % du résidentiel et 15 % du tertiaire)
– un ensemble appelé « réseau de chaleur » pour environ 4 Mtep, avec la répartition 8 % du résidentiel et 30 % du tertiaire.
– gaz pour 4 Mtep en provenance de biogaz et en partie produit par méthanation (voir plus loin la méthanation, dans la rubrique sur la variabilité de l’éolien).
Consommation dans le secteur du transport
La consommation totale pour les transports, qui était de 631 TWh (54 Mtep), tombe à 250,8 TWh (21,6 Mtep, à répartir entre 11,2 pour les personnes, 8,2 pour les marchandises et 2,2 pour l’agriculture).
Ceci représente une baisse de 57 % par rapport à 2015, à répartir entre sobriété pour 42 % et efficacité pour 15 %.
La sobriété seule représenterait un gain de 266 TWh (23 Mtep), soit 45 % de la consommation actuelle mobilité. (hors agriculture), un miracle reposant sur la seule bonne volonté (et un peu de persuasion forcée) de la population, qui avec bonheur fera de la marche à pied, ou de la trottinette.
Le dossier de synthèse prévoit une légère baisse de 15 % de la mobilité des personnes mesurée en km/hab.an (17200 actuellement). La place de la voiture (actuellement 71 % de la mobilité des personnes) est ramenée à 49 % y compris le mode dit en partage. La part des transports en commun, a priori plus sobre, est accentuée, multipliée par 1,75, mais ceci reste limité.
Pour le transport individuel, toutes les possibilités, a priori favorables à la réduction, sont mises à contribution, depuis la réduction de la vitesse sur route et autoroute (respectivement 80 et 110 km/h), la division par 2 de l’emploi de la voiture individuelle (passe de 11000 à 5500 km/hab.an). On trouve aussi la division par 2 de l’usage de l’avion (pratiquement zéro en France métropolitaine, associé à un doublement du TGV).
Pour les marchandises la baisse globale est un peu moindre, avec une réduction de 23 %, en passant de 300 Gt.km à 230, avec une division par 2 pour la route (à ce jour à 210 Gt.km), et une multiplication par 2.5 par le rail (type de dépense à faire, que l’on a du mal à voir dans les investissements).
Pour les transports, le premier poste en énergie finale est le gaz dit réseau (origine biogaz ou gazéification à partir de biomasse solide ou méthane issue de méthanation) pour 15,5 Mtep, puis l’électricité pour 36,1 TWh (3,1 Mtep) et enfin les combustibles liquides pour 3 Mtep, auquel il faut ajouter 0,5 TWh d’hydrogène. On notera que l’accent est mis sur le moteur thermique gaz.
Compte tenu du très fort développement prévu des transports en commun (TGV, multiplié par 2, métro tramways…) il devrait rester peu pour le véhicule électrique individuel, même si ceci est mentionné à côté des hybrides, dans la rubrique efficacité, sans préciser si ces derniers ne sont pas rechargeables, ou si on considère une flotte en partie hybride rechargeable et toute électrique.
On trouve enfin l’hydrogène, mais à si petite dose (environ 0,2 %) que l’on a du mal, à voir, pour ci peu, justifier la mise en œuvre d’un réseau très spécifique et les risques inhérents à ce fluide explosif, que nous ne souhaiterions pas voir dans nos garages. Fallait-il absolument répondre au lobby hydrogène, en concurrence avec celui électrique ? Mais la filière hydrogène a longtemps été un allié de la sortie du nucléaire.
L’efficacité a un rôle mineur dans la baisse et n’interviendrait que pour 8 %. Il est fait mention de « motorisation plus efficace avec les véhicules hybrides allant vers les 2 litres au 100, et les véhicules électriques ». Il est curieux que l’on ne mette pas en avant, les avantages de la motorisation électrique, en se référant non à l’énergie finale, mais à celle dite utile, celle qui sert au déplacement des masses. La prise en compte d’un facteur proche de 3 dans les rendements entre moteur thermique (à fuel, ou à gaz) et moteur électrique, n‘est pas évoquée. En considérant que le rendement, en passant du moteur thermique au moteur électrique est amélioré d’un facteur 3, les 3 Mtep d’électricité seraient l’équivalent de 9 Mtep de combustibles fossiles et il y aurait ainsi un gain de 6 Mtep en énergie finale.
Mais dans la tradition Negawatt, comme celle de l’ADEME, dans le même état d’esprit que le domaine des pompes à chaleur, vu ci-dessus, il ne faut pas trop mettre en avant l’usage de l’électricité. Mais ici aussi une petite révolution est passée et on en parle, mais sans insister.
Consommation dans le secteur de l’industrie
L’industrie passe de 33 Mtep (387 TWh à 15,8 Mtep (183 TWh) soit une baisse de 53 %).
En se situant par rapport au scénario de référence Negawatt, la seule sobriété représenterait 34 % de la baisse. Ici plus que dans les autres domaines, apparaît l’incongruité du scénario tendanciel, qui prévoit une baisse de 12 %, ceci sans aucun effort, dans la simple continuité. Avec l’industrie, on est vraiment dans l’idée majeure de Negawatt et la décroissance désirée.
L’efficacité n’apporterait qu’une faible participation à la baisse de consommation. Voici un point sur lequel, il y aurait un consensus en considérant que l’essentiel, de l’effort d’efficacité dans l’industrie, a déjà été fait depuis les crises pétrolières et financières avec l’envolée du prix de l’énergie, calé sur celui du pétrole, même si en se référant à l’année 2015, les prix du baril sont fortement retombés mais les adaptations industrielles déjà faites sont les bienvenues.
L’électricité représente 72,8 TWh et la chaleur 9,5 Mtep (110 TWh)
La chaleur vient essentiellement
– de la biomasse solide 4,6 Mtep,
– de l’environnement 1,8 Mtep (Pompes à chaleur)
– du solaire thermique 0,9 Mtep,
– gaz issu de la méthanation : 0,6 Mtep, et enfin un peu de liquide ou gaz biomasse
C’est le seul secteur de consommation qui garde un résidu de fossiles, sous forme de pétrole : 0,25 Mtep
Consommation dans le secteur de l’agriculture
Le secteur de l’agriculture bouge très peu sous l’aspect consommation énergétique. Il passe de 5,7 à 4,1 Mtep, soit une baisse de 28 %, soit beaucoup moins que la moyenne de 56 %.
La part électricité augmente, en passant de 11,2 à 15 TWh (1,3 Mtep)
Un zoom sur l’électricité
De la production à la consommation finale d’électricité
La production actuelle d’électricité de 540 TWh, descend à 516 TWh, soit – 24 TWh. Pour passer à la consommation interne, il faut corriger du bilan export/import, qui important et positif de 60,6 TWh en 2015, est prévu retomber à 18,9 TWh en 2050.
Cette baisse, s’expliquerait elle par la fin d’une électricité française bon marché, au niveau européen, grâce au nucléaire ? Cela semble évident, car avec le bon des EnRi, le prix de l’électricité française va flamber. La compétitivité française dans le domaine de l’électricité va disparaître, mais ceci est peut être voulu par l’Allemagne, téléguidant les décisions au sein de l’Europe.
Hors bilan export/import, il y aurait, pour la totalité de la production électrique, un petit plus de 17,7 TWh, soit + 3 % en 35 ans, bien loin des tendances, bien au dessus du pour cent par an, que l’on rencontre dans tous les pays du monde et ceci à toute époque depuis l’invention de l’électricité, sauf en de courtes périodes de guerre et/ou de crise. Mais, en sachant qu’une large partie de la production sera détournée, vers la méthanation, pour faire face à l’intermittence des EnRi, nous sommes vraiment dans Negawatt dans une séquence de forte décroissance de l’électricité, considérée comme le porte drapeau du progrès, dont celui social.
Cette production d’électricité viendrait des sources directes suivantes:
Eolien 247 TWh, à partir d’une puissance totale installée de 77 GWi.
Voilà un bilan difficile à valider, donnant une durée moyenne de 3207 heures par an. Avec 49 GW de terrestre et une moyenne de charge de 2500 heures par an, sauf miracle attendu des NG d’éoliennes en terre, il faudrait arriver à 4446 heures par an pour l’offshore. Mais, comme là rien n’est encore fait en France, on peut toujours rêver. Des miracles, encore des miracles.
L’ensemble des 18000 éoliennes en terre couvrirait une surface totale d’environ 4000 km², soit 0.4 Mha. Ce n’est pas considérable, d’autant que ces surfaces sont à considérer comme en grande partie accessible et cultivable, donc un impact limité sur la disponibilité des terres. Mais l’obstacle majeur vient, hormis l’impact touristique en partie désastreux pour la France, des nuisances potentielles avec la proximité de l’habitat, dont la limite des 500 mètres. Cette limite a été instaurée, déjà contre l’avis de l’Académie de Médecine qui proposait le double, lorsque les éoliennes de l’époque, avec des puissances de 2000 à 2500 kW, atteignaient en haut de pâle 80 mètres de hauteur. Avec les 6 MW on arrive à 180 mètres de haut. Il faudrait qu’à minima la distance soit proportionnée à la hauteur, et portée à 1000 mètres. Mais le lobby EnR et son syndicat, a réussi à s’opposer à ce changement lors de l’établissement de la loi LTEV, avec une forte intervention de la ministre de l’environnement, plus concernée par le lobby EnR, que la santé des citoyens. On peut penser que cette extension de l’éolien est très problématique, et que les citoyens perturbés dans leur vie courante réagiront.
Photovoltaïque 147 TWh, à partir de 136 GWc. Ici pas de réserve, sur le facteur de charge.
Ceci supposerait une surface capteurs d’environ 1000 km². La puissance est prévue se répartir en majorité, avec 106 GWc, pour des installations sur toitures (habitat, hangars divers…). Ceci est en théorie sans occupation de terres agricoles, sous réserve toutefois que des pratiques actuelles de construire des hangars à objectif panneaux photovoltaïques et l’argent facile avec la vente de l’électricité ne prennent trop d’importance. A ceci il faut ajouter environ 20 GW pour des centrales au sol. Pour ces dernières, il faut sensiblement doubler la surface capteur pour arriver à la surface au sol et ceci donne 300 km². Mais, contrairement à l’éolien, ici le sol ne peut être exploité, il faut même le nettoyer des herbes sauvages pour éviter son enfouissement, une maintenance parfois imprévue.
Hydraulique terre 54 TWh. Pour cette dernière, on ne note pas de modification significative. Les quelques adaptations de sites existants, pour accroître la production seraient compensées par une petite baisse de la productivité « imputable au dérèglement climatique ».
Il faut noter, que l’hydraulique terre est déjà très variable d’une année sur l’autre (en moyenne 65 TWh sur les 10 dernières années avec des variations d e70 à 58) Il semble difficile de retenir que, d’ici 2050, la tendance sera à une forte baisse liée au changement climatique, hormis l’accroissement des détournements d’eau pour l’agriculture. Ce qui est le plus important à retenir est que la capacité ne devrait pas fortement augmenter, et à 1 à 2 GW près, il y a consensus.
Hydraulique mer 14 TWh
Il faut rappeler que celle-ci se limite, pour l’instant à l’usine marémotrice de la Rance, avec une puissance de 240 MW et une énergie produite de 600 GWh (facteur de charge de 28.6 %). Cette filière est quasiment abandonnée dans le monde entier. La France pionnière dans ce domaine a payé les « pots cassés » pour tous.
Les mêmes déboires ont affecté la filière houlomotrice (les vagues) en retenant le fiasco de Pelamis, mais là le promoteur/précurseur était britannique et une victime consentante, le Portugal, qui s’est encombré d’une épave qui rouille, en bord de côte.
Pour l’avenir de l’hydraulique mer, Negawatt ne détaille pas, mais semble retenir l’hydrolienne, celle en début de test en France. La puissance serait de 4,2 GWi, soit un facteur de charge de 38 %, pour les 14 TWh annoncés. Ce facteur de charge peut sembler très optimiste, voire irréaliste, en comparaison avec celui de l’usine marémotrice, basée sur les mêmes forces physique de la mer et les mêmes lois physiques de la nature.
De cette production primaire totale issue en direct de sources renouvelables électriques de 462 TWh, sont rajoutés 53,7 TWh venant des postes de production secondaires, de cogénération chaleur, soit un total de 516 TWh en production.
Ce dernier chiffre pourrait faire penser qu’en valeur absolue, la place de l’électricité n’a pas beaucoup changé par rapport à aujourd’hui, corrigée du bilan export/import.
Mais ceci change fortement, si on suit le chemin vers la consommation et en premier les pertes associées à la prise en compte de la variabilité des renouvelables intermittents, et déjà les 181 TWh soutirés à destination de la méthanation, pour faire face aux surproductions momentanées des ENRi (éolien et photovoltaïque)
Ceci donnerait un bilan intermédiaire de 335 TWh. Pour arriver à la consommation finale, il faut prendre en compte :
– les 6 TWh, du bilan net du passage par les STEP (24,4 consommés pour 18,3 produits, traduisant un rendement de 75 %)
– les 31,6 TWh d’alimentation du secteur spécifique énergie
– les 6,5 TWh de pertes en lignes
Nota :
Les 6.5 TWh annoncés de pertes en ligne, représentent, entre 1 et 2 % de l’énergie transportée. Ce chiffre est particulièrement faible, il devrait être au voisinage de 7 %. Mais il en est ainsi de toutes les évaluations de pertes sous estimées dans le scénario Negawatt que ce soit celui 2011 ou celui 2017.
Ceci conduit à un bilan de 291 TWh, pour une distribution nette est de 272,2 TWh
– 72,8 industrie (en spécifique)
– 74,7 résidentiel (36,4 en spécifique et 38,3 en chauffage)
– 73,6 tertiaire, (48,5 en spécifique et 25 en chauffage)
– 27,9 mobilité,
– 23,2 agriculture (15 en spécifique)
Il y aurait dans ce remontage un surplus de 19 TWh, exactement celui indiqué comme excédant électrique. Mais qui en voudra, si le cout de l’électricité française n’est plus compétitif.
La variabilité de l’éolien et du photovoltaïque
Généralités
L’électricité, simple vecteur énergétique, n’est pas directement stockable. Il faut à chaque instant ajuster la production aux besoins. Ces besoins sont déjà, en moyenne en intégrant l’énergie sur plusieurs semaines, très variables au cours de l’année, mais il y a le temps de se préparer pour faire face à ces variations globales. Par contre ces besoins sont encore plus variables, mais ici en valeur instantanée de puissance au cours d’une simple journée, d’heure en heure, et il faut réagir en continu et sans rupture, à la minute près, voire même à la seconde près.
Si on peut agir en partie, assez peu, sur la consommation, il appartient à l’ensemble des sources de production de s’adapter. Toutes les sources d’électricité, qui peuvent ajuster leurs puissances, assurent ainsi, à ce jour, en permanence de façon quasi satisfaisante, même si pas toujours parfaite, l’équilibre entre la consommation et la production. Ainsi agissent l’hydraulique, les centrales à combustibles fossiles et le nucléaire, pour au total en 2015, varier entre 15000 et 20000 MW (de 15 à 20 GW) dans une seule journée. Cette variation se retrouve essentiellement, lors de la montée des besoins chaque matin de 5 h (lorsque la vie redémarre après la longue pose de la nuit) jusqu’à un semblant de pallier vers 11/12 h, ceci en toute saison.
Mais, l’arrivée de nouveaux systèmes productifs renouvelables, dont l’éolien et le photovoltaïque, avec des puissances de déversements sur le réseau très variables et en partie aléatoires, (terme honni par Negawatt, qui parle de fluctuant), va accentuer le besoin de modulation des autres producteurs, sauf si des techniques de stockage d’électricité, à ce jour quasiment limitées aux seules STEP, ne prennent le relais, ceci, joint à des mesures coercitives de gestion de la consommation.
Sauf en agissant fortement quasiment en continu sur la consommation, Il faut que le réseau soit équipé en puissances installées de réserves, prêtes à démarrer, ou à changer de régime en fonction de la production des éoliennes (et donc des fluctuations des vents) et de la course du soleil, cette dernière seule, assez bien prévisibles, de la plus forte puissance possible à zéro garanti.
La situation dans Negawatt 2017
De façon générale, le dossier de synthèse indique que les moyens de flexibilité aujourd’hui disponibles (hydraulique de barrage, stations de pompage-turbinage, centrales thermiques d’appoint, effacement des industries électro-intensives, importations, …) sont largement suffisants pour faire face à une augmentation sensible de la contribution de ces deux filières (éolien et photovoltaïque).
Nota : Il faudrait y ajouter le nucléaire, qui centrale thermique de base, à différencier de celles fossiles, participe tout autant à la flexibilité, mais Negawatt va s’efforcer de prouver le contraire, en minorant ce rôle déjà existant, pratiquement chaque jour, accentué les weekends.
Il est aussi reconnu, que lorsque ces deux filières atteindront des taux élevés de pénétration, il sera nécessaire de disposer de davantage de moyens de stockage permettant de déplacer dans le temps des quantités d’énergie importantes, citant les volants d’inertie pour des temps courts, le power to gas pour le stockage inter saisonnier, en passant par les batteries, l’air comprimé… De toute citation, seul le power to gas semble prévu et ce n’est pas un moyen de stockage pour restituer, lorsque nécessaire de l’électricité, mais un moyen de consommation adaptable.
Dans Negawatt, d’ici 2050, en arrivant à une puissance totale installée de 217 GW de puissance variable, il est clair que nous sommes sortis de la gamme d’augmentation sensible, indiquée ci dessus. C’est presque le double de la situation actuelle de puissances installées de toutes les sources en France.
Il nous reste à croire en l’affirmation de Negawatt que l’équilibre entre la production et la consommation d’électricité est assuré sur une base horaire.
Mais là-dessus, au même titre que la présentation par l’ADEME du scénario 100 % renouvelables électriques, nous sommes plus qu’incrédules, comme le montre le tour d’horizon ci-dessous.
Pour l’éolien, sur l’ensemble de la France, on retient, qu’en limite, la puissance totale de 77 GWi ne sera jamais atteinte pour produire et qu’à l’opposé à d’autres moments défavorables, il y aura toujours quelque part un peu de vent, le zéro vent peut arriver pendant quelques jours, une fois, tous les 3 à 4 ans. Ainsi, en fait, on peut retenir, que la puissance instantanée pourrait varier de 60 GW à 4 GW (période anticyclonique, très peu de vent, pouvant affecter quelques jours en continu, plusieurs fois par trimestre), avec de grandes variabilités, aucune régularité à prévoir sur quelques jours
Pour le photovoltaïque, il y a moins d’incertitudes, la puissance maximale sans jamais atteindre la puissance de crête de 136 GWc, en totalité peut s‘en approcher par exemple 110 GW, mais une certitude pour la majorité du temps, ce sera zéro, en particulier, lors des pics de consommation de fin d’après midi, soit une plage de 110 à 0 GW en production instantanée.
Globalement ces deux sources, qui ensemble constituent le cœur de la production électrique, peuvent voir la puissance produite passer de 170 GW (milieu de journée, par période de fort vent) à 4 GW en fin de journée, soit d’un côté très largement au dessus, de plusieurs dizaines de GW (par exemple 130 GW) des besoins de consommation, soit, très en dessous à quasiment zéro.
Cette situation proche du quasi zéro produit conduit à faire appel aux autres sources dont la puissance ajustable peut être appelée. A ce jour au niveau national, ce sont l’hydraulique, le nucléaire et les combustibles fossiles (charbon et gaz) qui interviennent, pour assurer une variation de l’ordre de 20 GW, autant en été qu’en hiver, auxquels il faut ajouter l’importation en situation extrême.
Avec la fin du nucléaire et des fossiles, le peu de changement possible sur l’hydraulique (hormis une amélioration de l’usage des STEP, en énergie cumulée, mis non en puissance), avec Negawatt ,on s’approche du black out, hors importation, la pénurie forcée. Ceci ne semble pas poser de problème à Negawatt, pas plus qu’à l’ADEME dans sa vision jumelle, dite le 100 % renouvelable, qu’un coup de pouce important vienne nécessairement à l’occasion de l’importation. Mais les liaisons avec nos voisins sont encore limitées, et surtout ceux-ci peuvent aussi être en manque simultanément. Il faut dire et redire que la fausse idée du foisonnement européen, longtemps soutenue et portée aux nues, par les tenants des renouvelables électriques a été démystifiée. En période anticyclonique toute l’Europe est affectée.
Le scénario Negawatt conduit de façon sure au black out.
A l’opposé, lorsqu’il y a surproduction, qui peut dépasser les 130 GW, la solution du « méthane de synthèse (power-to-gas) est présentée par Negawatt, « comme l’une des clés de voûte du système énergétique de 2050 ». Il s’agit de consommer, de façon en partie «‘utile » (hors aspect financier, et pertes en rendement) en comptant sur les 181 TWh du méthane de synthèse (appelé méthanation) et, aussi sur les 24,4 TWh de STEP.
L’appel aux STEP est fortement développé dans Negawatt, puisque les 4,8 TWh soutirés en 2015 passent à 24,4 TWh, soit 5 fois plus, un nouveau miracle, mystère. Les STEP représentent à ce jour une puissance de 4,2 GW en pompage (pour 4.9 en production) et fonctionnent donc en moyenne 3 heures par jour. Va t-on les faire fonctionner 15 heures en pompage et 15 heures en production. Mais, la journée n a toujours que 24 h !
Comme elles vont fonctionner en production un temps proche de ce facteur 5 (ainsi veut la physique de base) alors qu’il n’est pas prévu la création de nouveau site STEP, comment peut on croire en ceci, alors qu’un consensus se dégage pour retenir une limite de prévoir 1 à 2 GW en plus de STEP, écartant de toute façon, les projets de celles dites marines.
La méthanation couvre 181 TWh de consommation. Ce sont, presque la moitié de la production des EnR, qui sont détournés du cycle direct vers la consommation, pour alimenter des électrolyseurs, qui a partir de l’eau produiront de l’hydrogène. Cette technique de production par électrolyse ne représente, à ce jour, que1 % de la production d’hydrogène, avec en objectif principal l’industrie, l’essentiel venant de combustibles fossiles (exemple : le vaporeformage du gaz), du fait de son coût.
Le fonctionnement des électrolyseurs est affecté d’un rendement de 78 % (pertes 39.8 TWh). Ceci représente déjà une hypothèse très optimiste (une de plus) pour des électrolyseurs à charge constante, ce qui ne sera certainement pas le cas, avec les grandes variations de production. Faut-il une puissance installée d’électrolyseurs d’environ 95 GW (les 100 de surproduction, moins les 5 de STEP) ? C’est gigantesque, inconcevable, il faudrait le préciser.
Cet hydrogène sera à 95 % orienté vers la méthanation, l’essentiel du reste allant vers l’usage direct de l’hydrogène dans l’industrie, et un curieux petit soupçon vers la motorisation, choix assez incompréhensible de vouloir soutenir à si petite échelle cette nouvelle filière.
La méthanation, passe par la réaction avec le gaz carbonique (réaction de Sabatier), mais rien de dit clairement d’où vient le gaz carbonique ? (faut-il en récupérer 12 millions de tonnes par an en 2050). Il est suggéré que ceci vienne de sources biomasses. Ceci suppose la multiplicité des installations de séparation du gaz carbonique des fumées de combustion. Les pertes de 47 TWh, venant s’ajouter aux 39.8 TWh électrolyseurs, recouvrent elles les énergies pour séparer le gaz carbonique, de l’azote, le transporter. Encore des pertes, des pertes et encore de nombreux doutes.
Un zoom sur la biomasse
En énergie primaire, le total en incluant les déchets, passerait de 16,7 Mtep (197,3 TWh) en 2015, à 36,5 Mtep (423,9 TWh) en 2050, soit un peu plus qu’un doublement, correspondant à couvrir, 42 % des besoins en énergie primaire, sensiblement au même niveau relatif que l’ensemble des électricités éolienne et photo voltaïque. Un poste essentiel.
La biomasse se présente sous 3 formes : solide, liquide, gaz.
• La biomasse solide fournirait 21,4 Mtep (249 TWh) d’énergie primaire. Elle serait issue de la forêt, avec un prélèvement de 120 millions de m³ effectué chaque année, soit pratiquement la limite de l’accroissement annuel sur pied. (en 2015 seuls environ 66 Mm³ étaient prélevés). Ce prélèvement est destiné au bois d’œuvre, au bois industrie (papiers cartons…) et au bois énergie. Pour l’énergie s’ajoute les apports des petits bois des vergers, vignes, arbres urbains, taillis bords de route, bois d’élagage. Bien que la surface forestière reste quasi stable, il est considéré, par Negawatt, que la production de biomasse solide pourrait être multipliée par 2.5, grâce à une meilleure exploitation, le développement de l’agro-forestier et plus de récupération des déchets. Un miracle.
• La biomasse gaz fournirait 11,5 Mtep (134 TWh) d’énergie primaire. Elle ne comptait que pour 6,3 TWh en 2015, soit un facteur multiplicatif proche de 20. Ceci constitue une quasi révolution, issue de la généralisation de la méthanisation (déjections animales, résidus de culture, cultures intermédiaires sur terres arables, herbes sur 1/5 des prairies, d’une grande majorité des bios déchets ménagers et industriels.
Quant on rappelle, que l’exemple Allemand de la méthanisation forcée, repose essentiellement sur l’utilisation de cultures énergétiques (dont maïs) pour des raisons de bon fonctionnement d es méthaniseurs, on ne peut qu’être sceptique sur la validité de ce saut d’un facteur 20.
Ceci doit être examiné en parallèle de l’approche Afterre, développée par l’ONG Solagro, qui notamment prévoit la libération de 5 à 8 millions d’hectares de terre, antérieurement destinés à l’alimentaire, pour conversion en biomasse-énergie. On notera notamment la division par 2 de l’alimentation viande et laitage, pour libérer une partie significative de prairies. Mais Negawatt ne pense qu’au bien être et à la santé des français en imposant la division par 2 des nourritures carnées et lactées.
Cette biomasse gaz est destinée en majorité à la mobilité et en partie à la chaleur.
• La biomasse liquide fournirait 3 Mtep (35 TWh), soit sensiblement au même niveau qu’en 2015 (36,2 TWh). Mais, changement, il s’agirait de biocarburants de deuxième génération à partir de matériaux ligno-cellulosiques (paille, bois). Les usages vont vers ceux difficilement convertibles au gaz ou à l’électricité, qui nécessitent des carburants liquides, comme l’aviation.
• Les déchets ne fourniraient que 0,5 Mtep (5,5 TWh), en forte baisse (13,4 TWh en 2015). Cette baisse serait consécutive à la réduction générale des déchets, sobriété généralisée, effet de la prolongation de vie des matériels…Que de chemins à faire pour les citoyens !
De ceci résulte un très important gaz réseau, de 19,1 Mtep (222 TWh) à répartir entre gaz chauffage et industrie (tous secteurs sauf mobilité) pour 6,8 Mtep et du gaz carburant mobilité pour 12,3 Mtep
Autres sources diverses, solaire et géothermie
Pour être complet dans ce tour d’horizon, nous complétons avec deux sources non explicitées ci-dessus :
– Le solaire thermique (eau chaude sanitaire) représenterait 1,6 Mtep (18,8 TWh).
Il représentait 0,1 Mtep (1,3 TWh) en 2015. Il concernerait l’industrie, le résidentiel et le tertiaire
– La géothermie profonde (eau chaude chauffage) représenterait 0,9 Mtep (10,5 TWh)
Elle comptait pour 0,24 Mtep (2,8 TWh) en 2015.
Nota : La géothermie profonde, destinée au chauffage en réseau, ne doit pas être confondue avec la géothermie de surface (ou géo solaire), et celle aérothermie (air), toutes mises en œuvre en association aux pompes à chaleur (7,36 Mtep, tirés de la nature (environnement)
Approche économique
Dans notre conclusion sur l’analyse Négawatt 2011, nous avions regretté l’absence d’analyse financière, comme celle faite pour Negatep, en préparation du DNTE. Ceci nous a conduits à faire, en 2013, la même démarche de comparaison économique Negawatt 2011/Negatep , en 2013.
Le dossier Négawatt 2017, maintenant répond, à notre interrogation de l’époque, et présente les résultats de l’approche économique qui peuvent se résumer comme suit :
– «En ce que concernant le seul secteur de l’énergie, la somme annuelle des dépenses « investissement + fonctionnement + importations est du même ordre de grandeur entre le scénario Négawatt et le scénario tendanciel jusqu’à 2025, soit 110 G€ (milliards d’euros) par an. Au-delà le total des dépenses annuelles du scénario Négawatt diminue régulièrement de 110 à 80 G€ / an.
– Les dépenses énergétiques cumulées globales 2015-2050 sont donc de 4200 G€ dans le tendanciel et de 3530 G€ dans le scénario Négawatt. Le solde en faveur de ce dernier est donc de l’ordre de 700 G€. »
– En cumul et toujours pour le secteur « énergie », le scénario Négawatt mobilise 1160 G€ d’investissements jusqu’en 2050, soit l’équivalent de 6 mois de PIB national actuel, dont 860 G€ dans les renouvelables et 304 G€ dans les réseaux d’énergie et les énergies non renouvelables. Le scénario tendanciel mobilise quant à lui 650 G€.
En donnant l’écart par rapport au scénario tendanciel défini par Negawatt, on devrait trouver ici un début de réponse, qui pourrait s’exprimer en résumant que la sortie commune des combustibles fossiles et du nucléaire, ne coûte rien, mais rapporte même en moyenne 20 G€ par an, en moindre dépenses sur la période 2015 à 2050, par rapport à un scénario tendanciel. Ce serait très notable, les réserves sur l’effort de sobriété demandé à la population, restant toujours présentes.
Toutefois, un premier examen des premiers résultats lève de sérieux doutes sur la validité de l’approche économique présentée. Un premier exemple : les écarts d’immobilisation entre Negawatt et le tendanciel sont affichés pour 510 G€ (1160 – 650), alors que nous avions estimé, pour la seule rubrique isolation des logements (habitat et tertiaire) un total de 1250 G€, soit plus du double. Si à côté on regarde le coût d’investissement des seuls 77 GWi d’éolien et 136 GWc de photovoltaïque, qui ne devraient pas exister dans le tendanciel, nous arrivons déjà à 1733 G€, sans tout compter, au lieu des483 G€ annoncés. Un facteur 4 incompréhensible.
Nos doutes deviennent réalité, dans ce domaine encore plus que dans d’autres déjà cités, la validité du dossier dans sa partie « Coûts et investissements » est plus que douteuse, et nous la remttons en cause.
En conséquence, dans la continuité de notre approche faite en 2013 évoquée, ci-dessus, nous avons repris indépendamment la comparaison, mais non pas, par rapport au scénario tendanciel actualisé Négawatt (scénario qu’il aurait fallu appeler, improvisé, adapté), mais par rapport à une référence celle du statu quo, qui se réfère à la situation énergétique actuelle, reproduite telle qu’elle, avec juste + 13 % sur tous les postes, traduisant la simple prise en compte de l’accroissement de population. Ceci s’écarte du vrai scénario tendanciel continuité, accroissement de consommation lié à l’accroissement du PIB, bien loin du scénario tendanciel adapté, sponsorisé Negawatt, en voie vers la décroissance, comme référence, avant d’avoir commencé.
Alors que le scénario référentiel, statu quo, conduit à un cumul des dépenses de 5088 G€ (moyenne 145 G€/an, celui présenté par Négawatt reviendrait à 5684 G€ (162.4 G€/an), soit un écart de 596 G€ (17 G€ de plus par an), soit à l’opposé de l’annonce Negawatt, qui ne présente que des dépenses totales en décroissance année, après année, dès 2027, et chiffrées en baisse de moins de 30 G€ en 2050.
L’accroissement des dépenses pour notamment améliorer l’efficacité, comme l’isolation des logements, celles pour remplacer le pétrole (pour la mobilité) et le gaz (pour le chauffage), par des renouvelables thermiques et surtout le remplacement de l’électricité nucléaire, par celle des renouvelables, ne s’avère pas contre balancé, par la baisse de la facture d’achat des combustibles fossiles, qui retombe à zéro en 2050.
On notera en particulier le surcoût imposé par le caractère particulier (variable/intermittent) de l’électricité issue des éoliennes et du photovoltaïque. Ces derniers, avec une puissance installée de 217 GW, peuvent voir la puissance produite varier de 170 GW à 4 GW, imposent de lourdes dépenses pour la seule méthanation (les rendements étant pourtant très surestimés, sans compter le vrai coût des électrolyseurs…).
Par rapport au scénario statu quo, ce sont environ 7500 millions de tonnes de gaz carbonique qui ne sont pas rejetés à l’atmosphère, pendant les 35 ans de la transition. Pour équilibrer le surplus de dépenses, il faudrait l’institution d’une taxe gaz carbonique moyenne de 79 €/tonne, croissante par exemple de 50 à 100 €/tonne.
Conclusion
Il ressort que la conclusion que nous avions écrite après l’analyse de Negawatt 2011, n’est pas modifiée, elle se trouve même renforcée, avec ce plus d’éolien et de photovoltaïque et par contre coup celui de la méthanation. Compte tenu de cette dernière, faut-il prévoir environ 100 GW d’électrolyseurs, à côté des plus de 240 GW de puissances installées toutes sources confondues ? Que de puissances installées, et donc d’investissements si peu utilisés, du fait de leur faible facteur de charge ! Et d’où vient le gaz carbonique et, à quel coût déjà de pertes énergétique ?
A première vue séduisant, le scénario Négawatt repose en grande partie sur des hypothèses extrêmement ambitieuses de possibilités de réduction des consommations, sur un rôle considérable accordé au méthane et sur des erreurs d’échelle quant à la possibilité de faire face à l’intermittence de l’éolien et du photovoltaïque.
Les réductions de consommation escomptées dans les principaux postes de consommation, que sont les logements et les transports sont techniquement et financièrement inaccessibles. Elles supposent en outre que de nombreux interdits soient mis en place : interdit d’augmenter les surfaces de logement, alors que les tendances actuelles sont dues en grande partie à la multiplication des familles monoparentales et au vieillissement de la population, interdits sur l’alimentation, interdits sur l’habitat individuel, etc. Les mesures préconisées vont sans doute dans le bon sens, mais, poussées à l’extrême, elles deviennent irréalistes, sans compter que la volonté de les imposer systématiquement ne peut qu’inquiéter.
L’appel massif au méthane, de préférence aux biocarburants pour la mobilité et à l’électricité pour les usages fixes, repose sur des données irréalistes, notamment sur les rendements des opérations, dont celles liées à la méthanation (production d’hydrogène, collecte du gaz carbonique et stockage de ces gaz). Ceci conduit à s’interroger sur les conséquences d’un échec partiel de la démarche : le gaz naturel, en remplacement du méthane synthétique, serait alors la seule voie possible avec, en contre partie, une dépendance accrue vis-à-vis des pays producteurs et, encore plus grave, une augmentation des rejets de CO2.
Et tout ceci repose sur un rejet idéologique du nucléaire, basé sur un argumentaire erroné sur les risques associés aux rayonnements, sur la réalité des conséquences des accidents nucléaires, alors que celui-ci peut être considéré comme la source d’énergie la moins défavorable à la santé, et n’oublions pas, que le pire est le manque d’énergie, indispensable à la santé.
Annexe : Le rejet du nucléaire selon Negawatt
Ce choix zéro nucléaire justifié, en introduction par le « choc Fukushima », vu ci-dessus, est complété dans le dossier dans la même veine par « une réduction du risque d’accident nucléaire », et « en limitant la quantité de matières radioactives qui seront à traiter et stocker par la suite, diminuant ainsi l’ensemble des risques liés à leur traitement »
Sans développer un long argumentaire, sur la réalité des risques liés au nucléaire, nous signalerons déjà que toute source d’énergie présente des avantages et des risques, mais le pire est certainement le manque d’énergie, ce qui ne milite pas en faveur d’une vision forcée vers la restriction, la décroissance, même celle baptisée « heureuse », pour ne pas dire décadente, misérabiliste.
Dans l’application du principe de précaution, il faudrait faire, pour le nucléaire, la balance des aspects positifs et des réserves. Mais certains aspects non jugés positifs, voire négatifs avec réserves sont traités directement d’inacceptables, sans nuance, analyse par Negawatt. Mais l’a priori sortir du nucléaire est dans son ADN, la base de sa vie.
Parmi les aspects très positifs, apparemment sans contestation possible, on note en premier : la lutte contre l’effet de serre, Ceci vaut de suite la contre réaction, de Négawatt, qui argumente :
Concernant le premier argument, voici un résumé : « le nucléaire produit effectivement peu de CO2 (4 à 110 gCO2éq/kWh) mais il est peu employé, donc ce n’est pas un moyen efficace de lutter contre le rejet de gaz à effet de serre ».
Le « donc » fait tomber des nues, lorsque l’on fait la comparaison France / Allemagne. Chaque Allemand rejette 79 % de plus de gaz carbonique qu’un Français. Ce fait incontestable est lié à l’importance relative du nucléaire, dans la production d’électricité entre chacun de ces 2 pays.
En moyenne on trouve ainsi 70 grammes de rejets de gaz carbonique par kWh d’électricité en France (7 % de l’électricité d’origine fossile) , contre 580 en Allemagne. (53 % d’électricité d’origine fossile). L’Allemagne cité comme modèle avec le développement des renouvelables intermittents, et ayant débuté la sortie du nucléaire, n’a pratiquement pas baissé ses rejets, avec un back up assuré par le charbon. Le seul modèle à ne pas suivre.
En fait, Negawatt, comme le parti politique des Verts, l’ADEME et le lobby des énergies renouvelables, ne cessent d’essayer de contester, depuis toujours le rôle potentiel du nucléaire, pour limiter les rejets de gaz carbonique.
En second point des aspects positifs du nucléaire, on note en général: l’indépendance énergétique.
Et de suite à l’attaque, Negawatt fait remarquer :
« De même que plus de 90 % de nos transports dépendent des importations de pétrole, près de 80 % de notre électricité dépend d’importations d’uranium. »
Le nucléaire permet à la France de produire son électricité par ses propres moyens, en toute indépendance par rapport aux marchés extérieurs. Il est vrai que l’uranium, après avoir été extrait à l’étranger est importé. Mais la matière première ne représente qu’environ 3 % du coût du kilowattheure produit. L’essentiel des dépenses soit 97 % reste national, ce qui est loin d’être le cas, pour, par exemple le gaz, pour lequel plus de 80 % de l’argent va à l’étranger, et le retour en force du gaz est une garantie avec le scénario Negawatt.
Par ailleurs, l’uranium se trouve très réparti dans le monde et non cantonné au Moyen Orient, ou dans l’ex URSS, comme pour le pétrole et le gaz. En outre, la France est associée à la propriété et à l’exploitation d’importants gisements d’uranium dans le monde. Notre pays dispose ainsi d’un «portefeuille» de réserves acquises représentant 35 années de consommation au taux actuel. Mais il faut ajouter, à ce capital librement disponible, les stocks d’uranium constitués, déjà présents sur notre territoire, équivalant à plusieurs années de consommation (de 6 à 8 ans). Cette situation assure à la France une complète maîtrise de son approvisionnement en uranium, à l’abri de toute contrainte extérieure.
Ceci doit être comparé à notre vulnérabilité en cas de blocage des routes du pétrole, puisque l’on parle de réserves stratégiques de pétrole de quelques mois seulement, mais aussi de l’approvisionnement en gaz, à la merci en partie du bon vouloir de la Russie. D’un côté des mois d’angoisse, de l’autre, des années de sérénité. Negawatt a choisi.
En troisième point de la liste des aspects positifs du nucléaire on trouve : le prix modéré, garanti stable de l’électricité (modéré, pour ne pas dire bas)
Le scénario Negawatt se présente comme « globalement moins coûteux que le scénario tendanciel ». Nous avons émis, déjà, des réserves sur cette affirmation vue dans la globalité des sources d’énergie, mais on peut insister, qu’elle est mal placée, incongrue, quand on se penche spécifiquement sur le vecteur électricité. Il faut rappeler que déjà via la CSPE, nous payons de 5 à 7 milliards d’euros par an, pour soutenir le développement de l’éolien et du photovoltaïque, qui n’assurent que 7.5 % de la production. Cette somme est payée par les consommateurs actuels d’électricité, venant en majorité du nucléaire.
Le nucléaire seul subventionne ces sources, qui du fait de leurs variabilités le pénalisent en plus sur son facteur de charge, une double peine. Avec en 2015, 17 GW installés de ces sources d’électricité, nous en avons déjà trop, et il faudrait les multiplier par 12, pour arriver à 217 GW au total de Negawatt !
Le coût du nucléaire fait l’objet de nombreuses controverses et évaluations. Il faut rappeler le rapport de la Cour des Comptes (Rapport 2013/2014) pour le parc actuel EDF en service, qui donne un coût économique de 59,8 €/MWh, avec la méthode dite « CCE » (coût courant économique). Même s’ils devaient un peu augmenter, dans le futur, avec la suite des EPR, le nucléaire reste la source d’électricité la moins chère en France, pour une électricité, adaptable aux besoins, rien, à voir avec celle produite par les renouvelables intermittents et aléatoires. Une électricité hachée, dépendante de la nature, souvent là quand on n’en a pas besoin, mais à l’inverse absente, lorsque les besoins sont vitaux.
Après avoir évoqué les aspects positifs, il faut traiter des réserves que met en avant Negawatt, pour condamner sans nuance le nucléaire, dès l’introduction : « cruciale après le choc de Fukushima – d’un avenir électrique sans nucléaire », puis en développant comme :
« Le scénario Negawatt permet par ailleurs, c’est une évidence, une réduction du risque d’accident nucléaire. Ce qui représente aujourd’hui un risque pour les dizaines de millions de riverains des centrales réparties à travers la France … La fin progressive de l’utilisation de l’énergie nucléaire permet ainsi de réduire le nombre d’années de fonctionnement de réacteurs, tout en limitant la quantité de matières radioactives qui seront à traiter et stocker par la suite, diminuant ainsi l’ensemble des risques liés à leur traitement.
Par ces textes, très succincts, sont avancés, sans explication, des sentences définitives sur les risques liés aux rayonnements, sur les conséquences des accidents nucléaires et sur les déchets, tous liés par le premier thème: la peur des rayonnements.
La peur des rayonnements
Il faut en premier rappeler la citation : « Toutes les choses sont poison, et rien n’est sans poison, seule la dose fait, qu’une chose n’est pas un poison ». Cette phrase, bien connue prononcée par Paracelse (XV° siècle), de plus en plus d’actualité, s’applique spécifiquement à la radioactivité. Cette radioactivité ne se sent pas, ne se voit pas, et l’invisible fait peur. Pas plus que le monoxyde de carbone, les oxydes d’azote, les micros particules…, la radioactivité ne se perçoit, ne se voit. Mais par contre, elle se mesure très aisément, et le moindre crépitement d’un compteur peut faire peur, le diable en personne. Il suffit pour cela qu’un membre de la CRIRAD ait préréglé, dans la gamme ad hoc, le compteur, pour avoir l’effet garanti, même s’il n’y a rien, sinon un bruit de fond naturel ! En tout lieu, il est possible de faire crépiter un compteur, de préférence en présence d’une caméra de télévision, et en plus en ajoutant un fond sonore, commentaire sinistre, bien sur.
Avant d’évoquer les risques santé, il faut se référer aux doses naturelles, que nous subissons apparemment sans conséquence sur nos santés. Pour ce, nous nous basons sur le Sievert Sv (et plus couramment sur son millième le mSv), seule unité quantifiée, accessible, qui traduit l’impact éventuel d’un rayonnement sur l’homme.
En France les rayonnements naturels annuels correspondent à des doses moyennes de 2,4 mSv, avec de fortes variations géographiques, pouvant en de vastes régions atteindre 5 mSv, et en quelques lieux spécifiques 25 mSv, certains renommés pour leurs eaux minérales vivifiantes. Dans le monde, de vastes zones peuplées, même surpeuplées comme en Inde au Kerala, des doses moyennes atteignent 50 mSv, et on peut trouver encore plus.
Si des fortes doses sont néfastes, voire mortelles (au delà de quelques Sievert), il peut être considéré que, ce qui est désignée « petites doses » avec une limite à 100 mSv pour les adultes et 50 mSv pour les enfants, soit sans conséquence pour la santé. Que les marchants de peur cessent de se prononcer pour des doses autour du mSv.
Aucune étude, ni épidémiologique sur l’homme, ni sur les animaux, n’a jamais pu montrer de relation de cause à effet entre les faibles doses et l’apparition de cancers.
Les accidents nucléaires
On trouve, en tête du dossier Negawatt, évoqué Fukushima (2011), qui seul justifierait la décision de sortir du nucléaire. En ajoutant Three Miles Island (1979), Tchernobyl (1986), on peut faire le tour complet des accidents nucléaires.
Ces trois accidents ont conduit à des conséquences sur la santé, très diverses et controversées.
Si le bilan s’écrit de façon sûre, sans contestation, par un zéro conséquence pour le premier aux Etats Unis, il faut insister que ce type de réacteur (PWR), est le plus développé dans le monde (279 en service et environ 50 en construction). C’est le modèle adopté et développé en France, sans le moindre accident depuis 40 ans.
Le bilan, est malheureusement tout autre pour le second Tchernobyl, qui a conduit à de très nombreux morts, dont le nombre fait l’objet de multiples controverse, allant d’environ une centaine, à 4000 cancers mortels à venir dans les 75 ans suivant l’accident. C’est beaucoup, mais ceci se réfère à un modèle de réacteur (RBMK) que nous n’aurions jamais construit en Europe. Mais, même avec quelques milliers, on est loin du million, sans évoquer les 10 millions de morts avancés par Greenpeace et répétés régulièrement par la chaine de télévision franco-allemande, Arte. Mais à force d’asséner des contre-vérités, certaines finissent par marquer !
Quant au dernier accident au Japon, sur un modèle de réacteur à eau bouillante (BWR), filière qui n’a pas été sélectionnée en France dans les années 70, en dépit des chiffres avancés par les marchands de peur, les évaluations sont toujours de zéro conséquence liée au rayonnement. Mais il faudra surtout tenir compte des milliers de personnes déplacées, avec les conséquences indirectes sur leurs santés.
Quelles que soient les controverses autour de ces chiffres, nous pouvons affirmer qu’au niveau mondial l’électronucléaire a fait moins de morts en 50 années d’exploitation que les autres grandes sources de production d’électricité n’en font en une seule année. Comparé à ces autres énergies (charbon, gaz, pétrole, hydraulique), le nucléaire s’affirme, sur le plan mondial, comme l’énergie qui provoque le moins d’accidents, et qui entraîne le moins de victimes, comme le montre le récapitulatif ci-dessous, associé à la production d’électricité par TWh produit.
– le charbon 61 morts (278 en Chine, 15 aux USA)
– la biomasse 12
– l’hydraulique 1,4
– le solaire 0,44
– l’éolien 0,15
– le nucléaire 0,04 (dans l’hypothèse pessimiste de la relation linéaire sans seuil (RLSS)
Ces bilans, tant mondiaux, qu’européens ne font que conforter le rapport de l’Académie Française de Médecine, émis lors du débat national sur la transition énergétique, établissant, que de tous les grands moyens de production d’électricité, c’est « le nucléaire qui a le plus faible impact sur la santé par kilowattheure produit ».
Les déchets
Negawatt s’exprime en parlant « des matières radioactives qui seront à traiter et stocker par la suite, diminuant ainsi l’ensemble des risques liés à leur traitement »
Au moins Negawatt reconnait que les déchets radioactifs font l’objet de traitement, Ils ne sont pas abandonnés, laissés sans suivi, précaution. Mais on souhaiterait que Negawatt explique quels sont ces risques, alors que les opérations de traitement sont effectuées en France depuis le début du nucléaire, sans rien à signaler, sans la moindre conséquence sur la santé directe pour le personnel professionnel.
Il fallait là aussi introduire la peur, et ceci mérite quelques explications sur la réalité de ces déchets.
Qu’ils aient ou non des centrales nucléaires, tous les pays développés produisent des déchets radioactifs. En France, si les deux tiers proviennent du programme électronucléaire, le reste provient d’autres secteurs, comme celui du médical, ceux de la Défense nationale, de l’industrie, et enfin de laboratoires de recherches, dont l’objectif n’est pas lié à l’industrie électro nucléaire, mais qu’il faut aussi traiter, mais l’industrie nucléaire prends tout en charge.
La quantité totale de tous les déchets nucléaires est relativement faible. Ils représentent environ 1 kilo par habitant et par an, dont 10 grammes à vies longues et très radioactifs, contre 4000 kg pour les autres déchets, dont 100 kilos de matières toxiques, dangereuses (mercure, plomb, arsenic…)
L’affirmation que « l’on ne sait pas quoi faire des déchets » et qu’ils constitueraient une menace pour la santé des générations futures est fausse, et clairement démentie par la pratique industrielle française sur plusieurs dizaines d’années. En effet, c’est tout à l’honneur de l’industrie nucléaire que, pour la première fois dans l’histoire industrielle, on se soit préoccupé de gérer les déchets produits, dès l’origine, et on l’a fait consciencieusement.
En France, tous les déchets nucléaires sont conditionnés, entreposés et stockés selon des techniques éprouvées et sûres. Leur gestion assurée par l’Andra (Agence Nationale pour la gestion des Déchets Radioactifs) n’entraîne aucune nuisance significative pour les personnes ou l’environnement.
Plus de 90 % des déchets nucléaires sont à vie courte et comme la radioactivité diminue naturellement, au bout de 300 ans, ils deviennent assez rapidement inoffensifs. Ils sont stockés dans 3 centres (La Manche, Soulaines, Morvilliers) sans dommage significatif pour l’environnement.
Les déchets à vie longue et de haute activité sont incorporés, dès l’usine de retraitement, dans une matrice de verre qui piège les radioéléments. Ces blocs vitrifiés, dans une enveloppe en acier inoxydable, sont enfermés dans des conteneurs en acier et entreposés en attente dans des puits bétonnés sur le site de l’usine de retraitement. Cette méthode est mise en œuvre depuis 40 ans sans qu’il en résulte une quelconque nuisance, et que trouver de plus stable que le verre, en sachant que les déchets ne sont pas mis en bouteille, mais chimiquement intégrés à vie dans la matrice.
Si cet entreposage dans des puits bétonnés est gérable, car les volumes sont très réduits, il n’est pas considéré comme durable à l’échelle de plusieurs générations. Du fait de leurs forts niveaux de radioactivité et de leurs durées de vie, la solution de gestion retenue, est le stockage géologique profond Cigeo (Centre industriel de stockage géologique). Cette solution de stockage définitif en couche géologique profonde, toutes études faites, a été décidée avec un centre devant entrer en service en 2025.
NDLR – Non traité et réactions :
B.D. : L’occupation de l’espace, qui est une limitation forte, mais qui n’est prise sérieusement en considération dans aucun document, pas plus Négatep que Négawatt. Par contre sur le terrain, on voit se développer fortement en ce moment les associations de défense contre l’éolien.
Négawatt veut semble-t-il 26 GW d’éolien en mer. Cela représente 52 centrales comme celle qui va être installé à Saint-Brieuc, au grand dam de beaucoup de riverains, qui ont perdu tous leurs recours, et environ 5 000 km2 d’occupation du domaine maritime dans des zones où il y a déjà de nombreux conflits d’utilisation.