Jacques Peter 19 juin 2019
Compte rendu du colloque hydrogène du 13 juin 2019
A la Maison de la Chimie
Edouard Freund, président du comité énergie des IESF a été l’un des organisateurs et le président de séance de ce remarquable colloque réunissant les compétences répondant aux questions que se pose notre comité qui étudie les stockages.
J’ai donc répondu à son invitation et propose à nos associations un compte rendu que je reconnais orienté par mes intérêts personnels : efficacité des divers moyens permettant de contenir le réchauffement, équilibre des systèmes électriques, donc place de tous les moyens et donc aussi du nucléaire, mobilités, compétitivité de la France, tant pour les productions industrielles nationales que pour les exportations de services performants.
N’étant ni un scientifique ni un expert de l’énergie, je m’abstiendrai de résumer ce colloque et renvoie ceux qui seraient intéressés au site de la Maison de la Chimie qui propose toutes les communications:
: https://actions.maisondelachimie.com/colloque/hydrogene-decarbone-enjeux-et-solutions/
En outre je ne me permettrais pas de commenter les exposés scientifiques portant sur des recherches explorant des voies d’avenir.
Le contexte
Plan Hulot
L’introduction du président Boucly de l’AFHYPAC, ex dirigeant de GRT GAZ, place l’Hydrogène sous l’éclairage du « Plan Hulot » : 100M€ débloqué, avec comme objectifs :
• 10% de l’hydrogène industriel vert en 2023, entre 20 et 40% en 2028
• 5000VUL et 200 V lourds, bus et trains en 2023
• 20 à 50 000VUL et 800 à, 2000 V lourds en 2028
• 100 stations en 2023, 400 à 1000en 2028
• Stockages d’énergies renouvelables dans les zones non interconnectées, par exemple les DOM
Intérêts des professions du gaz
Il y a une alliance forte entre l’AFHYPAC et les intérêts gaziers qui sera confirmée ensuite par un exposé de M. Mazzenga de GRT gaz renouvelables précisant qu’il étudiait une demande du ministre sur les divers taux d’injection d’hydrogène que pouvaient supporter ses diverses branches des réseaux et les clients. En l’absence de réponse à ce jour au ministre, nous sommes alors restés sur notre faim.
A été évoquée une vision de l’ADEME souhaitant sauver le réseau gaz avec un mix à parts non précisées de biogaz, gaz issu de pyrogazéification de biomasse, éventuellement enrichie d’hydrogène vert.
C’est un enjeu important, car le réseau gaz, très belle transition énergétique des années passées, qui a déplacé le charbon et une grande part des fiouls et satisfaisant une consommation finale d’un peu moins de 500TWh, aurait des problèmes de rentabilité si la demande baissait au-dessous de 300TWh.
Le moins que je puisse dire, c’est que sur cet enjeu les études de France Stratégie et les décisions du projet PPE conditionnant les objectifs de gaz vert à de très fortes baisses de coût tempèrent fortement cette vision ADEME.
Association systématique de l’hydrogène aux énergies solaires et éoliennes
Alors que la majorité des slides présentaient des champs solaires et des éoliennes, un seul dessinait aussi un réacteur et le mot nucléaire n’était cité que deux fois. Une autre contribution s’illustrait avec un dessin de Reiser prônant comme légende « sortir du nucléaire »
Les dits et les non-dits
Enfin, il m’est apparu qu’il était aussi intéressant d’analyser ce qui était dit que ce qui ne l’était pas, en particulier pour les chiffres économiques : les rendements et les coûts, ceux de la production d’hydrogène, comme les hypothèses choisies pour ceux des intrants.
Trois technologies d’électrolyse
Elles sont décrites par Edouard Freund dans une note de travail sur le stockage pour le comité énergie des IESF :
« Le stockage d’électricité via l’électrolyse de l’eau et la production d’hydrogène, selon :
-électrolyse : H2O = H2 + ½ O2
-H2 + air = électricité via pile à hydrogène ou turbine à gaz (cycle simple ou combiné)
répond à tous les besoins de stockage, notamment les stockages intersaisonniers de grande capacité. Ceci n’a rien d’étonnant, sachant que l’hydrogène intermédiaire de stockage joue un rôle analogue à celui des combustibles fossiles, notamment du gaz naturel, et se présente à terme comme un concurrent du biogaz. Le rendement global très faible de l’opération est lié au produit de 2 rendements :
-l’étape d’électrolyse (rendement 60 à 75% selon technologie) ;
-la production d’électricité à partir de l’hydrogène formé et d’air (ou de l’oxygène coproduit avec l’hydrogène) : rendement de l’ordre de 50% pour les faibles ou moyennes capacités avec une pile à combustible, pour les grandes puissances avec un cycle combiné hydrogène.
Le rendement global qui en résulte est peu susceptible de dépasser la valeur de 40%, ce qui est défavorable en liaison avec une production issue des énergies intermittentes, dont il faudra augmenter la puissance installée, ce qui augmentera les besoins de stockage…L’électrolyse présente un grand intérêt en elle-même du fait qu’elle offre une voie permettant « d’échapper » au tout électrique auquel conduisent les énergies décarbonées hors biomasse.
Il existe 2 technologies d’électrolyse industrielle :
-la technologie alcaline, la plus répandue, pour des capacités qui peuvent atteindre plusieurs centaines de MW. Ce type d’électrolyseur ne se prêtait pas facilement à des marches intermittentes. Des développements sont en cours pour la « moderniser », notamment pour améliorer son rendement et sa souplesse d’utilisation ;
-la technologie à membrane échangeuse de proton (similaire, mutatis mutandis à la technologie de pile à combustible PEMFC). Elle présente une plus grande souplesse d’utilisation (fonctionnement en tout ou rien), et peut fournir de l’hydrogène sous pression (minimisant ainsi les pertes lors de la compression pour le stockage). Elle a par contre l’inconvénient d’utiliser des métaux nobles (platine…) comme catalyseur d’électrodes, ce qui peut poser problème pour les très fortes capacités.
Une 3ème technologie : électrolyse haute température pourrait bénéficier des développements de la pile à combustible haute température SOFC et conduire à de hauts rendements, voire à des systèmes réversibles électrolyse – production d’électricité.
« En ce qui concerne les modes de stockage de l’hydrogène, ils sont parfaitement maîtrisés industriellement, depuis les cylindres haute et très haute pression (acier ou matériaux composites) pour des stockages de faible ou moyenne capacité jusqu’au stockage massif en cavité de sel. »
Les présentateurs de ces trois technologies n’ont pas décrit des processus complets de productions d’électricité renouvelables et finale après stockage, de transport, intégrant les différents coûts et fournissant une estimation du coût de l’électricité restituée. Mais ils ont tous trois affirmé pouvoir sous condition approcher la compétitivité de la production d’hydrogène à partir d’électricité décarbonée comparée à celle qu’utilise aujourd’hui les industries du raffinage et de l’ammoniac à partir de vaporeformage du gaz, donc source de fortes émissions de gaz carbonique.
Ils estiment ce coût actuel du vaporeformage à 1,5-2€/KgH2 et espèrent atteindre pour de très grosses capacités tournant en régime permanent pendant 7000heures par an, avec un prix d’achat de l’électricité entre 30 et 40€/MWh (environ 60% du coût final) de :
2 à 2,50€le Kg H2 produit par électrolyse, ce qui permettrait de se rapprocher de la compétitivité à condition que l’Europe monte très sensiblement la taxe carbone à laquelle sont soumis les industriels.
Les débats ont fait apparaitre deux problèmes :
L’Europe surveille avec juridisme tout ce qui pourrait ressembler à une aide d’état aux industriels français.
Monter les coûts français du raffinage et de la production d’ammoniac sans mesures équivalentes dans le reste de l’Europe et « protection carbone » aux frontières pourrait faire fuir ces industries dont les produits se transportent facilement.
M. Mauberger président de Mcphy-energy a présenté la technologie alcaline qui peut présenter des références en Chine et chez Audi (6MW) et sort à 30-50 bars. Et sera testée par Jupiter.
Avec un éolien de la mer du Nord évalué à 30€/MWh il sortirait entre 2 et 2,50€/KG H2.
J’ai pu poser ma question à son successeur M Pascal Pewinsky, Directeur Général AREVA H2Gen, présentateur de la technologie à échanges de proton pouvant accepter des variations de puissance et aboutissant aussi pour 7000heures avec de l’éolien à 30€/MWh à 2,40€/KGH :
« J’ai vu sur votre Slide décrire les sources d’électricité envisageables avec aussi le dessin d’un réacteur nucléaire. Pourquoi ne l’évoquez-vous pas plus, car EDF annonce pour les réacteurs historiques prolongés un coût moyen cash de 32-33€/MWH. Or seule cette source avec les grands gisements hydrauliques peut vous assurer dans la durée une fourniture fiable durable, sans risque carbone, et pour 20 ans. Une très grosse unité d’électrolyse reproduirait le schéma économique de Georges Besse 1 utilisant jusqu’à trois réacteurs du Tricastin pour enrichir l’Uranuium et s’effaçant pour entretien au creux de l’hiver. Certes EDF doit ajouter au coût cash une marge pour frais généraux et bénéfice, mais vous ne seriez pas loin de l’objectif. »
Pour obtenir la réponse, (Ma question était surtout une affirmation destinée à la salle de 250 personnes et m’a valu un remerciement d’un représentant Orano) j’ai dû contacter M Pewinsky lors de la pause et ai compris qu’il se positionnait comme client potentiel d’un parc éolien mer du Nord d’une capacité très supérieure à sa demande moyenne afin d’être toujours fourni à pleine charge au prix de 30€.
Mon objection : on ne peut pas acheter la crème au prix moyen du lait, encore moins négliger celui du petit lait qu’il faut bien valoriser.
Julie Mougin du CEA Genoble a présenté ses recherches sur l’électrolyse à haute température , fonctionne à 700-900° C
Avantages :
-Remplacer une part de l’énergie électrique nécessaire par de la chaleur, donc meilleur rendement.
-Tension faible
-Céramique
– Réversibilité, possibilité après un temps de purge de 15 minutes de passer en pile à combustible.
– Peut fonctionner en régime variable.
J’ai pu la rencontrer à une pause et lui expliquer comme je l’avais fait pour M Péwinski le principe de fonctionnement d’une usine du type de Georges Besse 2 qui s’efface au moment des pointes d’appel électriques. Elle a écouté avec intérêt et m’a répondu qu’autrefois, les premières études proposaient une source nucléaire pour cette technologie. Avantage : valoriser la source de chaleur nucléaire.
Y aurait-il donc des instructions en haut lieu pour que ces technologies hydrogène soient systématiquement associées seulement aux renouvelables électriques?
Une voie alternative, recherches de Total sur un H2 bas carbone associé au captage et à la séquestration du carbone.
M. Bruno Seilhan vive président de TotalCO2 nous a présenté une recherche :
« Associant les vaporéformateurs de méthane avec du captage. Usage et Stockage de CO2 apparaissant aujourd’hui comme la manière la moins coûteuse pour la production de masse »
Aujourd’hui 1T d’H2 responsable de 10 T de CO2
Coût du gaz 27dollars/MWh.
Le captage représente 60% du coût
3 compagnies se sont associées pour ce test norvégien
Des carburants alternatifs, efioul, encore très loin de la compétitivité
M ; François Kalaydjean d’IFPEN a décrit les processus permettant à partir d’hydrogène vert (En Europe pour être qualifiée de verte elle doit être renouvelable, influence du lobby allemand ?), de CO2 capté et de biomasse. On arrive, hors taxes, à 3€/litre de fioul contre 60 centimes pour les carburants sortant de raffinerie. Constat accueilli par un silence très éloquent de la salle.
L’hydrogène au service de centres tertiaires visant l’énergie positive
Une présentation originale de M. Nicolas Bardi, président de la société Sylfen propose sous le titre « Hydrogène et cogénération » une solution permettant aux divers secteurs tertiaires (Centres commerciaux, hôpitaux, Grand Stade, aéroports…) de prendre en main leurs engagements de réduction de leur emprunte carbone, celle-ci étant, à la différence de l’industrie, entièrement localisée dans le site principal.
Combinant productions renouvelables, essentiellement solaire, batteries, électrolyse, stockage d’hydrogène, et pile à combustible, le complexe pourrait ainsi, à défaut de couper le cordon ombilical avec le réseau, réduire très sensiblement sa contribution, et espère, bien sûr, lui vendre aux tarifs garantis ses excédents solaires.
Un débat intéressant sur ce type d’autoconsommation a eu lieu lors des auditions de ENEDIS et RTE par la commission parlementaire Julien Aubert. Son président a bien mis en lumière par ses questions le fait que le filet de sécurité du réseau, se traduisant par la garantie de fourniture de la puissance souscrite par ce type d’utilisateurs de l’autoconsommation, était bien subventionné dans les conditions tarifaires actuelles par l’ensemble des clients ordinaires qui payent le turpe pour toutes leurs consommations.
L’orateur a reconnu que la France était le pire pays pour rentabiliser son concept car :
-L’électricité n’y est pas chère
-Elle est décarbonée
– Le réseau est sûr
Ne pouvant poser de question, je lui ai fait passer un papier lui proposant de le développer dans des pays dont les réseaux sont sujets à défaillance, et connaissant moins que l’Europe les alternances hiver- été, pour les entreprises et surtout les riches qui s’équipent systématiquement de groupes diesel électrogène produisant une électricité très chère et polluante, exemples, le Liban, le Vénézuela, le Sénégal. La réponse: son sourire.
Mobilités : Ce qui a été dit , ça fonctionne, ce qui n’a pas été dit combien ça coûte au km
Les mobilités hydrogène ont été essentiellement évoquées par l’exposé liminaire du président Boucly évoquant les objectifs du plan Hulot et développant comme thème central:
Que ce n’est plus un problème industriel, puisque ça fonctionne déjà, mais un défi économique seul un grand marché pouvant obtenir par un changement d’échelle de faire baisser les coûts, d’où un appel aux pouvoirs publics.
Arguments repris par M. Serge Besse, Areva Stockage-énergie nous expliquant que les piles à combustibles sont maintenant parfaitement opérationnelles et ne cessent de faire des progrès et par Mme Cecilia Frourcry-Renzi d’Air Liquide décrivant les avancées, tant sur le plan des rendements que de la sécurité, de la logistique hydrogène.
Les exemples donnés dans le présent démontrent que cela fonctionne : flottes de taxis, bus urbains commandés par les communautés urbaines de Pau et Lens, trains à l’hydrogène en Allemagne envisagés en France, concernent essentiellement des secteurs peu ou non soumis aux règles du marché et de la concurrence, Par exemple les TER et services urbains financés par des collectivités locales sensibles à l’effet d’image de l’hydrogène et donc capables de le payer. Les prix actuels des VL de l’ordre de 80 000€ les réservent à une clientèle très marginale.
M. Julien Brunet de Symbio Paris nous a décrit le présent :
300 véhicules à hydrogène circulent en France comme en Allemagne avec 30 et 400 stations de recharges. Les projets plus importants du Japon méritent une analyse plus complète.
J’avais une question en réserve sur une réalité jamais dite: des études sérieuses démontrent que les VL et VUL à hydrogène consomment du réseau à la jante trois fois plus d’électricité que les véhicules récents à batteries. Voir en annexe le schéma de Georges Sapy. L’avis de beaucoup d’experts que je partage est que les voitures et petits utilitaires à batterie gagneront le match.
Une réflexion sur les mobilités décarbonées d’avenir ne peut pas faire l’impasse sur les comparaisons des coûts complets au km des divers concurrents. Rien n’a été dit sur ce sujet.
Le stockage des intermittents par le power to gaz
Alors que nous sommes abreuvés d’articles et communications sur les merveilles à venir du power to gaz permis par la filière hydrogène résolvant le défi du stockage intersaisonnier permettant de sortir du nucléaire, rien n’a été dit sur ce thème. D’ailleurs le Plan Hulot, apparemment toujours en vigueur n’envisage ce type d’utilisation de l’hydrogène que pour les zones non interconnectées, donc certainement pas pour 2035 en métropole. Ce seront des expériences intéressantes à suivre, notamment celle qui est prévue pour la Guyane. Dans des territoires où le solaire produit trois fois plus qu’en métropole, où l’alternance été hiver n’existe pas et, enfin où les groupes diesels produisent une électricité plutôt sale à 300€/MWh, le défi technologique et économique associant solaire, batteries et hydrogène est jouable. Mais curieusement les discours officiels associent le 50% de nucléaire 2035 au succès des divers stockages, par exemple les déclarations de Nicolas Hulot à l’assemblée nationale qu’il voulait rassurer sur le fonctionnement sûr d’un système électrique comportant 25 % d’intermittents de plus qu’aujourd’hui. Il disait qu’il croyait aux « batteries à l’hydrogène …et à des choses comme ça… ». Notons aussi l’étude sortie par l’ADEME juste après les annonces du Président Macron de novembre 2018, pour moi ayant essentiellement l’objectif de semer le doute sur la nécessité d’un nouveau nucléaire en affirmant qu’en 2060 un système renouvelable couplé avec des stockages serait le moins coûteux.
Le projet PPE prévoit des capacités de solaire et d’éolien dépassant chacune 40 GW pour 2035.
Quels seraient les ordres de grandeur des données de variation auxquelles devrait faire face des stockage long dépassant le créneau de compétence des batteries?
Pour l’éolien, les leçons de la tempête Miguel qui, d’après Météo -France, a les caractéristiques d’une tempête d’hiver sont à méditer. Pour 15GW d’éolien installé, nous sommes passé en 24 h de 5 à 10 GW, puis pour les 24 h suivantes de 10 à 1GW, ce pic de puissance ayant été pratiquement totalement absorbé par une baisse de pression du nucléaire. A l’horizon 2035 des gradients de puissance de + ou -24 GW en une journée, soit + ou -1GW/h sont à envisager. L’éolien peut, non seulement sur la France, mais aussi sur l’Europe connaitre aussi des périodes d’une dizaine de jour à très fort facteur, ou très faible facteur de puissance de quelques %. Lisser ces fluctuations dépasse les possibilités des batteries.
Le solaire d’été produit selon une courbe en cloche avec une amplitude d’une douzaine d’heure suivie d’autant d’heures de noir et peut atteindre un facteur de charge de 70%. Pour les puissances projetées pour 2035, cela conduirait à un pic de 24 GW de l’ordre de grandeur de la moitié de la consommation journalière.
Comment pourrait-on pour les technologies d’électrolyse compatibles avec des puissances variables dont la valeur économique n’est envisageable que pour des durées de fonctionnement approchant 7000heures/an stocker les productions de telles puissances ?
Et comment, en contrepartie, fournir les puissances nécessaires pour assurer la sécurité du réseau en hiver, par des piles à combustibles, des centrales au gaz ou à l’hydrogène? En Allemagne, les ingénieurs proposent à leurs gouvernement un back up de centrales au gaz de 60GW!
Il n’est donc pas étonnant que le colloque ait gardé le silence sur cette problématique en envisageant pas plus de quelques centaines de MW pour des électrolyses.
Continuer à rêver d’un système électrique 100% renouvelables, ou tout simplement d’un objectif de 50% de nucléaire sans construire des centrales au gaz relève de la réflexion suivante d’Yves Bréchet ex haut- commissaire à l’énergie atomique et membre de l’Académie des Sciences :
« Engager le pays, pour ce qui est des besoins énergétiques dans des choix qui reposeraient sur des ruptures scientifiques hypothétiques et à venir me semble aussi raisonnable de que sauter d’un avion en espérant tisser le parachute dans la durée de la chute. »
Mes conclusions
Ces conclusions sont très personnelles puisque mon objectif n’est pas l’analyse exhaustive des possibilités des technologies de l’hydrogène, mais ce que nous pouvons faire d’intelligent et de raisonnable avec ces technologies opérationnelles afin de répondre aux défis climatiques 2030-2050, qui relèvent presque du court terme pour les décisions.
D’abord arriver à rentabiliser à l’aide d’une taxe carbone européenne la production d’hydrogène industriel responsable de près de 2% des émissions françaises de gaz carbonique. Il est clair que la seule filière énergétique décarbonée capable de le faire rapidement serait celle de réacteurs historiques prolongés par le grand carénage.
Ensuite se donner l’objectif de fournir à nos territoires d’outre- mer un courant moins carboné.
Les avancées françaises en ce domaine donneraient à nos grandes entreprises leader de l’énergie un avantage compétitif dans les pays en développement tentés par ce concept. De même pour les centres de service autoproducteurs évoqués par M. Nicolas Bardi.
L’avenir des énergies renouvelables portées par les entreprises françaises passe par l’exportation.
Bien qu’ancien cheminot, et routier, je ne me sens pas compétent pour juger de l’intérêt des poids lourds et trains à l’hydrogène. Le défi est important pour les gros ensembles routiers : par exemple le transport par route de carburant sur des distances de 400 à 500km consomme seulement 1% de son contenu !
Il faudrait disposer d’un dossier exposant les avantages et inconvénients de toutes les technologies de décarbonation des transports lourds : Autoroute ferroviaire, techniques combinées, tramway et bus, et même trains à recharges rapides lors de leurs arrêts fréquents. Donc suivons avec attention les technologies de l’hydrogène. Nicolas Hulot avait tout à fait raison de décider d’un effort de recherche dans ce domaine comme dans d’autres, mais ne rêvons pas à une déesse hydrogène réglant de façon magique nos problèmes.
Et faisons attention à des annonces, telles celle des japonais, capables de transporter par mer de l’hydrogène produit à partir de charbon australien. Tant que la séquestration du CO2 correspondant ne sera pas acquise, ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui, cet hydrogène sera propre dans les villes japonaises en y émettant que de la vapeur d’eau, mais produira ses excréments climatiques dans l’atmosphère australienne.
Encore bravo et grand merci aux organisateurs et intervenants de ce colloque qui nous ont éclairé sur les potentialités du vecteur énergie hydrogène.
Jacques Peter
Droit de réponse de Michel Gay
Merci pour ce CR intéressant.
Qu’il me soit permis de donner aussi mon avis, et de redire tout le mal que je pense de l’hydrogène « vert » pour les Français (ce que j’ai déjà écrit plusieurs fois) :
Donc, contrairement à la conclusion de Jacques Peter, non Nicolas n’a pas eu raison de décider d’un effort de recherche dans cette impasse hydrogène.
Pourquoi suggérer de développer ce concept ruineux dans des pays en développement qui sont généralement pauvres ? Sauf à vouloir le faire payer par les Français…
Organisé par les promoteurs de l’hydrogène et le lobby du gaz, ce colloque éclaire surtout (me semble-t-il) sur les potentialités restreintes et ruineuses du vecteur hydrogène.