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0) Publication de Sauvons le climat
Il faut remettre la lutte contre les changements climatiques au cœur du programme.
« Sauvons le climat » s’était fortement impliquée lors du débat public de 2018 en publiant un cahier d’acteurs puis en dénonçant les incohérences du projet (https://www.sauvonsleclimat.org/fr/base-documentaire/ppe-comment-mettre-en-place-une-trajectoire-pertinente-quand-les-objectifs-sont-irrealistes ). Nous réclamions déjà une réorientation du projet de PPE pour viser de façon plus nette l’objectif prioritaire de lutte contre les changements climatiques. Force est de constater que la version proposée ici, malgré quelques ajustements, pose toujours des problèmes de cohérence et d’affectation prioritaire des moyens :
- Alors que la priorité est régulièrement donnée dans les propos du Président de la République (et ceux des gouvernants européens) à la lutte contre les changements climatiques, la LTECV ainsi que cette PPE continuent de se fixer un objectif irréaliste de baisse des consommations d’électricité (pourtant vecteur prioritaire de décarbonation de l’économie) et consacrent un ensemble incroyablement important de moyens techniques, régulatoires et surtout financiers au développement des énergies renouvelables en compensation de la réduction à 50% du nucléaire et à l’arrêt des dernières centrales à charbon. Pourtant la France occupe une position déjà éminente en matière de décarbonation de sa production d’électricité grâce à son parc nucléaire et hydraulique. Remplacer des réacteurs nucléaires par des éoliennes et des panneaux solaires ne réduit en rien les émissions de CO2 ! Ce n’est donc pas sur ce secteur de la production d’électricité que les efforts devraient être portés mais sur la réduction de tous les usages d’énergie carbonée grâce à deux effets à bien doser entre efficacité énergétique et substitution d’énergie. Cette erreur a déjà été dénoncée de nombreuses fois par des institutions, associations et groupes divers et il n’en est toujours pas tenu compte. De plus elle conduit à un renchérissement injustifié de l’électricité : part des taxes qui servent à subventionner les ENR et les mécanismes de capacité (dont la CSPE qui ne sert plus maintenant qu’à alimenter le budget de l’Etat), montant incroyable des investissements dans les réseaux.
- Contrairement à ce qui est affiché dans les documents soumis à examen, et alors que la LTECV fixe comme cadre prioritaire « la sécurité d’approvisionnement et la réduction de la dépendance aux importations », l’évolution du mix affichée conduit le pays à un risque majeur de ne pas pouvoir subvenir à certains moments aux besoins désormais vitaux en électricité. Ce risque est pourtant étudié (mais de façon incomplète), ce qui conduit à des solutions très coûteuses (en particulier l’augmentation drastique des lignes d’interconnexion) qui ne suffiront pas. La solidarité entre pays voisins, c’est bien, encore faut-il qu’il y ait à tout moment des offres de production quelque part pour répondre aux déficits, notamment en période anticyclonique d’hiver. C’est là qu’est le défaut puisque la plupart des états européens annoncent la fermeture de moyens pilotables très importants dans les cinq à quinze années à venir : centrales à charbon et à lignite, centrales nucléaires. Ce ne sont pas les initiatives telles que le « pentaforum » qui peuvent nous rassurer puisqu’invariablement les hypothèses de puissance garantie des énergies intermittentes telles que l’éolien et le solaire sont surestimées. Les études très pratiques et bien documentées de bons experts du domaine ont montré que la maxime « il y a toujours du vent quelque part » est fausse et que le solaire produit en Europe quatre fois moins en hiver (où la consommation d’électricité est maximale) qu’en été.
Devant ces constats très regrettables, une réorientation des efforts est indispensable :
- N’accorder aux évolutions du mix électrique que les soutiens vraiment indispensables : fermer au plus vite les centrales à charbon, sans autoriser de nouvelles centrales à gaz ; ne plus subventionner les énergies matures (éolien, solaire PV) ; revoir à la baisse les investissements dans les réseaux qui ne servent qu’à accompagner le développement des moyens non indispensables.
- Laisser EDF décider de la meilleure date de fermeture définitive de ses réacteurs en fonction de leur rentabilité et de leur sûreté dont la garantie reste entre les mains de l’ASN
- Réorienter les milliards d’euros d’aides anormalement accordées (point 1) vers les secteurs qui peinent à réduire leurs émissions : les transports, l’habitat et le tertiaire.
L’état a consulté les spécialistes à plusieurs reprises : débat public avant la LTECV, débat public sur la PPE, « Grand Débat », Convention Citoyenne, … De nombreuses interventions ont été faites par diverses instances présentant des argumentations sérieuses basées sur des analyses scientifiques. Mais elles ne sont pas réellement prises en compte. La France continue de faire fausse route. Il faut remettre la lutte contre les changements climatiques au cœur du programme en cohérence avec l’objectif prioritaire annoncé de neutralité carbone en 2050. Faute de quoi, on se paie de mots.
Eric Maucort
0 bis)
Avis de l’Association Sauvons le Climat:
pensons climat et compétitivité
Votre commentaire :
Un simple regard sur les 5 dernières années, de 2014 à 2018, révèle un
bilan bien décevant de la PPE actuelle sur les émissions de CO2 de la
France:
2014: 326 Mt 2015: 329 Mt 2016:322 Mt 2017:325 Mt 2018:315 Mt
(Source ministère : bilan-energie-2018-donnees-definitives decembre2019).
La nouvelle PPE 2021 en a-t-elle tiré des conclusions et a-t-elle été
modifiée en conséquence : bien peu.
QUELLE METHODOLOGIE RETENIR ?
« France Stratégie » a analysé ce que devait être la « valeur
tutélaire du carbone » pour évaluer les investissements et les
politiques publiques pour parvenir à la neutralité carbone en 2050 . La
conclusion, la même que celle que nous partageons depuis 2006, est qu’il
faudrait privilégier, compte tenu de l’urgence climatique, les
investissements les plus rentables à court/moyen terme pour protéger le
climat. Nous aurions ainsi plus tard une santé financière qui permettrait
d’aller plus loin, quand les moyens d’actions pour atteindre la
neutralité carbone seront devenus plus difficiles et plus coûteux. En
clair « Sauvons le climat » estime que toute action en faveur du climat,
très prioritaire, devrait être évaluée en fonction du coût de la tonne
de CO2 évitée.
QUE NOUS DIT LA PPE : LE FLOU EST SOIGNEUSEMENT ENTRETENU
En lisant la synthèse du projet de PPE, une heureuse surprise : elle
précise « C’est l’utilisation de charbon, de pétrole et de gaz qui
rend la croissance non soutenable » et « Pour atteindre cet objectif, il
sera nécessaire de réduire les consommations d’énergie, en priorisant
la baisse de consommation des énergies les plus carbonées, et de
substituer aux énergies fossiles des énergies décarbonées. »
Très bien, mais quand on s’investit dans le texte complet de la PPE,
l’intitulé des objectifs est fort différent. Il n’est plus question
de climat mais de croissance verte, avec une litanie de moyens d’action :
efficacité énergétique, développement des ENR et des réseaux ainsi que
des productions locales. Pas un mot sur le climat dans la « Nature de la
PPE » qui énumère en première page ses objectifs. Une rédaction
identique à celle de la PPE précédente, celle de l’échec ! Qui
veut-on tromper ? Le projet de PPE doit remettre le climat en première
ligne, en conformité avec la synthèse, mais surtout en cohérence avec
les déclarations du Président de la République.
QUELLES PRIORITES RETENIR
Le diagnostic est clair : en 2018 notre consommation d’énergie fossile,
de 116 Mtep, était quasi identique à celle de 2014, soit 118 Mtep. Les
émissions de CO2 principales étaient celles du transport (40,1%), du
résidentiel/tertiaire (23,1%) et de l’industrie (14,8%). Alors que ce
sont les secteurs auxquels il faudrait s’intéresser en priorité, force
est de constater qu’aucun de ceux-ci n’a progressé de 2014 à 2018
(moins de 1% d’écart selon les statistique citées ci-dessus), alors que
des fortunes en subventions ont été engagées dans le secteur de
l’électricité, qui émet seulement 6,6 % du CO2 (déjà 35 milliards
payés aujourd’hui pour les ENR électriques, et la PPE devrait conduire
à un total de 120 milliards d’ici 2035).
LES TRANSPORTS
Beaucoup est dit sur une transformation sociétale vertueuse mais il est
clair que les progrès des prochaines années résulteront essentiellement
de l’électrification des transports car notre parc de véhicules est
âgé (10 ans en moyenne) et devra être renouvelé en grande partie. Avec
une électricité décarbonée, le gain en termes d’émissions sera
immédiat. Les obstacles principaux sont le prix des batteries et celui du
développement du réseau de bornes de recharges : deux conditions sont
nécessaires, maîtriser le coût de l’électricité et mobiliser la taxe
carbone en faveur de ce secteur. Les autres technologies sont soit
décevantes (biocarburants de 1ère génération, désormais bannis par
l’Europe), soit seulement prospectives, sans espoir de percées
décisives dans les dix ans (biocarburants avancés, méthane ou hydrogène
vert). De plus certaines décisions, sous couleur environnementale, ont des
effets inverses à ceux souhaités : le transfert du diesel à l’essence
a provoqué une augmentation des émissions ! Les décisions, souvent
prises dans l’enthousiasme médiatique, comme également avec les
biocarburants en 2006, sont-elles bien évaluées ?
LE RESIDENTIEL/TERTIAIRE
Dans ce secteur l’écologie politique s’est fourvoyée : la PPE
actuelle et sa déclinaison dans la RT 2012, largement anti-électricité,
ont par exemple contribué à porter de 20 à 47 % l’usage du gaz pour le
chauffage dans le résidentiel et de 31 à 75 % dans l’habitat collectif
en 2017.
Quelques signaux laissent espérer dans la future RE 2021 un retour à la
raison avec priorité donnée au chauffage électrique performant et aux
ENR thermiques dans la construction neuve, et à la substitution de
celles-ci au fioul et au gaz dans les rénovations. Encore faudrait-il que
cette évolution, peu perceptible dans la PPE, soit confirmée dans le
projet de RE 2021 encore confidentiel.
En ce qui concerne les rénovations, très prioritaires pour réduire les
émissions, avec ses passoires énergétiques carbonées, quel équilibre
retenir entre substitution au fioul et au gaz d’une énergie non
carbonée, avec gain immédiat et massif sur les émissions, et travaux
d’efficacité énergétique que la PPE semble privilégier. Or ces
derniers se révèlent coûteux pour des gains CO2 limités, voire très
limités (enquête TREMI de l’ADEME). En effet ils sont bridés par la
conception même des bâtiments anciens (ponts thermiques, larges
ouvertures, …), et contraints par la nécessité de protection du
patrimoine esthétique et paysager. Ainsi, les études de Sauvons le climat
démontrent clairement que priorité doit être donnée à l’effacement
total du fioul, puis en grande partie du gaz (utilisable en biénergie
seulement), et aux seuls travaux raisonnablement « rentables »
d’efficacité énergétique, utiles à réduire les puissances appelées
(viser un indicateur énergétique compris entre 3 et 4 est déjà
ambitieux).
Le gouvernement devrait s’inquiéter plus sérieusement du développement
de la précarité énergétique qui s’est envolée de 3,6 à 5,7 millions
de foyers de 2018 à 2019 (et de 425 à 850 millions € par an)
La RT 2021, applicable dans la décennie à venir, aura un rôle majeur et
il est essentiel que l’étiquette énergétique mette en avant les
émissions de CO2 en premier lieu, et la consommation d’énergie finale.
Ce dernier indicateur est en effet le seul qui informe l’occupant d’un
logement de sa qualité thermique réelle, et lui permet une prise de
décision fondée d’engager des travaux, contrairement à l’indicateur
énergie primaire, seul retenu dans le Diagnostic de Performance
Energétique actuel.
Les ENR THERMIQUES
La PPE propose une évolution rapide d’ici 2028, environ quadruplement du
biogaz, doublement des PAC et du solaire thermique, augmentation de 33 % de
la biomasse solide. La ressource, la défense de la biodiversité, les
modes de financement le permettront-ils à a coût raisonnable pour la
collectivité ? Le passé montre que la tâche sera difficile avec une
évolution globale limitée à environ 20 % sur l’ensemble de la période
2012 à 2018. La contribution des ENR thermiques devrait rester assez
modeste, moins de 10 % de la consommation totale d’énergie finale, même
si les objectifs étaient approchés.
Mais ce sont des énergies domestiques, génératrices d’emplois, et la
question d’un transfert des subventions offertes des ENR électriques aux
ENR thermiques doit être posé. En effet les ENR électriques appellent
des équipements massivement importés et leur promoteurs les annoncent
déjà compétitives (donc logiquement sans besoin de subventions ou
d’aides). Une seconde interrogation concerne la biomasse solide,
essentielle en raison de sa vocation à être un puits de carbone. Faut-il
la brûler ou s’en servir comme matériau de construction et de
fabrication? : c’est souhaitable mais cela prendra du temps. Et comment
la financer ? Il faut du temps à un arbre pour atteindre la maturité,
des dizaines d’années et les modes de financement et d’assurance sont
aujourd’hui inadaptés. Rien sur ce point dans la PPE.
Ce patrimoine des ENR thermiques, national, n’est pas soutenu comme il le
faudrait.
L’ELECTRICITE
C’est notre meilleur atout du point de vue climatique, de loin, et le
plus débattu ! La PPE, fidèle à la LTECV, s’enferre dans ses
contradictions et ses échecs. Elle propose de continuer à consacrer des
fortunes au développement de l’éolien et du solaire, aux productions
aléatoires, avec pour objectif de perdre ensuite des fortunes en arrêtant
prématurément des centrales nucléaires pilotables, compétitives et
certainement capables de fonctionner longtemps (au moins 60 ans en France
quand des réacteurs similaires sont autorisés 80 aux USA !).
Il n’est pas question de rejeter éolien et solaire malgré leur réel
manque de compétitivité toutes externalités incluses (éolien terrestre
aujourd’hui à environ 80/90 €/MWh et solaire compris entre 65 et 190
€/MWh hors externalités pour des installations en 2019). Ils sont utiles
quand ils se substituent à des énergies carbonées, comme dans le reste
de l’Europe . Mais ce n’est pas vraiment
le cas en France, comme tristement constaté avec l’arrêt de Fessenheim
en 2020. « Sauvons le climat » considère que :
– La consommation d’électricité ne doit pas être contrainte à
priori, comme le souhaite l’ADEME, mais plutôt contribuer, au niveau
requis, à la réduction des émissions. – Il est urgent de préciser notre
politique nucléaire. Comme le rapport D’Escatha et EDF le préconisent
il faut lancer en urgence (et non après les prochaines présidentielles !)
une présérie de 6 réacteurs EPR, ceux -ci ayant déjà montré leur
efficacité en Chine, afin de restaurer la solidité de notre industrie. La
deuxième étape à préparer est celle du redimensionnement de nos moyens
industriels pour préparer le remplacement du parc actuel au rythme qui
sera requis.
– Le développement en parallèle les ENR électriques devra être
ajusté pour accompagner le déploiement des usages de l’électricité,
seul capable de générer une décrue massive des émissions des autres
secteurs (la neutralité est-elle envisageable ?). Remplacer à priori le
nucléaire n’a aucun intérêt et fragilisera notre économie.
– Corriger l’erreur commise par le gouvernement de mise sur le marché
européen d’investissements consentis par les français, notre stockage
hydraulique d’électricité (barrages et STEP), bien tentant pour des
pays voisins souffrant de l’intermittence excessive de leurs productions.
Ce stockage, renouvelable et très souple, est déjà indispensable pour
gérer au mieux les équilibres quotidiens, hebdomadaires et saisonniers de
notre électricité. – Examiner attentivement l’évolution du mix
électrique européen, avec des annonces d’arrêts massifs de capacités
de production pilotables (environ 80 GW d’ici 2035/2038) et en
conséquence, une dépendance accrue au gaz (acheté à l’extérieur de
l’Europe) et une fragilisation du réseau européen.
UNE FRANCE INDEPENDANTE
Le déficit de notre balance commerciale reste très important, 60
milliards € en 2018, le poids de l’importation de combustibles fossiles
étant majeur, 77 % du total. Or, dans ce domaine, c’est la
subsidiarité qui devrait l’emporter alors que l’Europe s’attache à
promouvoir une politique énergétique dans le droit fil d’une politique
allemande, dont l’inefficace du point de vue climatiqueest démontrée et
qui est très coûteuse (et pourtant admirée par nos ministres de
l’environnement successifs et l’ADEME).
L’angle d’attaque européen passe par des contraintes très fortes sur
la consommation d’énergie primaire, très défavorables à une
production d’électricité décarbonée pilotable (nucléaire ou
bioénergies), et sur l’efficacité énergétique. La politique
française devrait s’attacher très prioritairement à réduire les
émissions de CO2 (et bien sûr des autres GES, non traités ici) et la
consommation d’énergie finale au meilleur coût. Les attendus du projet
de PPE soumis à consultation devrait être lourdement modifiés en ce
sens, ainsi que le RE 2021 et les Diagnostics de Performances Energétiques
(DPE) à venir. Sinon l’échec sera assuré.
CONCLUSIONS
Le programme présenté, peu différent du précédent, fait la part belle
à l’idéologie, « la meilleure énergie est celle qu’on ne consomme
pas », « les énergies renouvelables doivent être portées à 100 % de
nos besoins », « localisme énergétique ».
C’EST UNE ERREUR MAJEURE ET LES CHOIX STRATÉGIQUES DOIVENT S’APPUYER
SUR UN CRITÈRE ESSENTIEL, LE COÛT DE LA TONNE DE CO2 ÉVITÉE, POUR
PROTÉGER FAMILLES ET ENTREPRISES, PUIS SUR LA MAÎTRISE ÉNERGÉTIQUE DU
PAYS. LES TECHNOLOGIES (NUCLEAIRE, ENR ELECTRIQUE ET THERMIQUES, ECONOMIES
D’ENERGIE, SUBSTITUTIONS d’ENERGIES, INTELLIGENCE ÉNERGÉTIQUE,
CHANGEMENTS SOCIÉTAUX), NE SONT QUE DES MOYENS. ELLES DOIVENT CONVERGER
HARMONIEUSEMENT, HORS IDÉOLOGIES MORTIFÈRES, VERS UN IMPACT CLIMATIQUE
OPTIMAL EN FRANCE, SANS DÉTRUIRE NOTRE COMPÉTITIVITÉ DANS UN CONTEXTE
INTERNATIONAL TRÈS INCERTAIN.
PENSONS CLIMAT ET COMPETITIVITE !
Autres contributions
1)
La face cachée de l’éolien ou comment manipuler l’opinion sur son cout
Il n’est de journée sans une annonce dans les média de la compétitivité de l’éolien: qu’en est-il réellement ?
UNE RÉFÉRENCE, LE COÛT DE MARCHE
Il oscille selon les jours et les saisons entre 40 et 60 €/MWH avec des bas inférieurs à 0 € et des hauts supérieurs à 100 €, mais peu d’heures chaque année. En moyenne on peut retenir une cinquantaine d’euros par MWh.
LE VRAI PRIX DE L’ÉOLIEN ?
Que nous dit la Commission de régulation de l’électricité dans son rapport annuel sur les charges de service public : le prix payé par EDF aux producteurs d’éolien était de 90,2 €/MWh en 2017 et sera de 91,1 €/MWh en 2020, ceci pour une production non garantie, et sans couvrir le coût des moyens de production qui doivent être disponibles en secours en cas de vent faible. L’éolien est donc plus de deux fois au-dessus du prix de marché en 2020. Est-ce lié à des tarifs plus généreux il y a quelques années ? NON
POURQUOI CET ÉCART ENTRE INFORMATION ET RÉALITÉ ?
Avant de quitter le gouvernement en 2017 Ségolène Royal a offert un cadeau royal au investisseurs de l’éolien : alors que la doctrine européenne était de passer par des appels d’offres elle a obtenu un traitement spécial pour la France : tous les parcs de moins de 7 éoliennes et de moins de 18 MW continueraient à bénéficier d’un complément de rémunération leur assurant de 75 €/MWh (y compris frais de gestion) aux conditions économiques de 2006 (cette date de 2006 n’est pas précisée, ce qui conduit à retenir la date de l’arrêté antérieur : ce point devrait être clarifié dans le cadre de cette consultation). Avec une inflation de 19 % cela porterait le prix d’achat garanti au producteur à 89 €/MWh en 2019, cohérent les chiffres donnés ci-dessus par la CRE.
Soucieux de leur intérêt tous les spéculateurs de l’éolien ont immédiatement tiré avantage de ce cadeau : quand vous observez les bilans trimestriels des implantations de parcs éoliens publiés par le ministère vous constatez que la quasi-totalité des parcs font moins de 18 MW (au 1er trimestre 2019 moins de 12 MW pour 91% d’entre eux et le reste inférieurs à 18 MW.) Ils sont donc tous éligibles à ce système juteux, seuls quelques investisseurs, dans les régions les plus favorables, préférant l’appel d’offre.
Pour ces derniers les résultats des appels d’offres ont été publiés pour la dernière fois mi 2019 et donnent 68,7 €/MWh, soit encore largement au-dessus du prix du marché, et sans aucune responsabilité sur l’équilibre du réseau.
ET IL FAUT PRENDRE EN COMPTE UN OU DEUX CADEAUX DE PLUS
En effet l’arrêté indique (article 11) un allongement de 15 à 20 ans de garantie d’achat par rapport aux années antérieures : le gain est encore plus élevé puisqu’il correspond à environ 33 % de plus sur la vie de l’éolienne.
De plus Madame Royal avait également annoncé que, dans le cadre du remplacement d’une petite éolienne par une grande (le refurbishment), le tarif d’achat serait prolongé pour 15 ans : cette annonce a-t-elle été suivie d’une décision ?
DEUX FAIBLESSES DE L’ANALYSE DE LA SITUATION PAR LA CRE
La première est que les tarifs accordés lors des appels d’offres ne sont plus publics, soi-disant pour protéger le secret industriel : mais ce sont les familles et les PME qui payent via des taxes. Et ils n’ont pas droit à l’information.
La seconde est que, sous la direction antérieure, la CRE avait publié un rapport sur la rentabilité sur fonds propres des parcs éoliens, qui montrait des abus notoires (l’investisseur emprunte l’essentiel aux banques à taux voisin de 2 % actuellement et capte, avec un apport infime, la quasi-totalité du bénéfice). La nouvelle direction ne communique plus sur ce sujet, pourtant critique : la transition énergétique n’a pas pour vocation de créer une caste de millionnaires.
CONCLUSIONS :
A l’occasion de cette consultation le rapport final devrait demander clairement une clarification de l’aspect financier du complément de rémunération : quel est le niveau moyen du prix garanti aux installations en 2019 (pour une technologie mature), est-ce bien sur 20 ans et non plus 15 ans, le refurbishement conduit-il à prolongation de 15 ans des avantages accordés au parc initial, quel est aujourd’hui le taux de rentabilité sur fonds propres. Ne pas accorder aux payeurs ces informations serait l’indication d’une volonté du ministère de tromper les citoyens. La transparence doit s’appliquer aussi aux ENR.
Jean-Pierre Pervès 1
BATIMENT – UN ECHEC
Le constat, d’échec, est que depuis 2016 la consommation finale d’énergie et les émissions de CO2 du secteur résidentiel/tertiaire sont quasiment constantes alors que la PPE actuelle est en pleine application.
UNE EVOLUTION INDISPENSABLE : PRIMAUTE A LA REDUCTION DES EMISSIONS DE CO2 PAR M2
Le projet de PPE 2021 progresse en ce sens qu’il est enfin clairement indiqué qu’un effort massif de décarbonation des énergies que nous consommons est nécessaire. Il reste cependant bloqué sur ce qui a été l’échec de la PPE en cours en ciblant en priorité les pratiques économes en énergie primaire et non finale. C’est cette dernière qui est indicative de la qualité réelle d’un bâti.
L’ILLUSION DES RENOVATIONS INTEGRALES DANS LE BATI ANCIEN
Dans le bâti ancien, l’essentiel du parc actuel, des études étayées montrent qu’on ne peut espérer obtenir mieux que 100 à 120 kWh par m2 et par an en moyenne, soit le niveau C en énergie finale, après des rénovations déjà lourdes et coûteuses pour les constructions antérieures aux années 1980, qui ont un indice actuel E. Si on examine les dépenses totales, il sera déjà ambitieux de vouloir mettre en classe D des logements en classe F ou G (7 à 8 millions de logements et de 2000 à 3000 €/logement).
Vouloir mettre en classe B en 2050 les logements classés E, F ou G (hypothèse de la Stratégie nationale bas carbone) sera à la fois inatteignable et extrêmement couteux, avec un gain très insuffisant sur les émissions de CO2 si gaz naturel et fioul ne sont pas bannis
DECARBONATION ET RENOVATION RENTABLES
La conclusion devrait être claire : il faut, dans le cadre d’un développement durable et supportable socialement dans le bâti ancien :
- mettre en place une équilibre économique optimal entre élimination du fioul et réduction drastique du gaz (remplacement ou introduction d’un chauffage biénergie associant une énergie non carbonée prioritaire, PAC ou ENR thermiques, accouplée au gaz lors de pointes de consommation), avec gain important et immédiat sur les émissions, et travaux de réduction des consommations rentables destinés à réduire les puissances requises.
- éviter, contrairement aux propositions, de remplacer les chaudières fossiles par des chaudières gaz, même performantes, avant un gain CO2 minime, car la neutralité carbone conduira à une seconde intervention pour les supprimer.
L’IMPORTANCE D’UNE ETIQUETTE ENERGETIQUE INCLUANT EMISSIONS DE CO2 ET ENERGIE FINALE
Deux erreurs essentielles, qui empêchent des progrès réels, peuvent être relevées dans la PPE actuelle et les Diagnostics de performances énergétiques (DPE) qui lui sont associés. - L’avantage donné depuis 2012 au chauffage gaz dans le neuf (installé dans les 2/3 du collectif neuf, le quart de l’individuel et 40 % du tertiaire en 2018) sur la base de l’énergie primaire.
- Les contraintes imposées au chauffage électrique (niveau des émissions de CO2 insensé et indicateur de performances exprimé en énergie primaire) : le résultat est que pour deux logements identiques, le chauffage gaz bénéficie d’un indicateur énergétique inférieur de deux niveaux à celui du chauffage électrique, alors qu’il est un émetteur réellement important de CO2 (le triple). Le chauffage électrique, qui équipe le tiers des logements, est ainsi lourdement dévalorisé.
Manque donc aujourd’hui, pour juger de la pertinence de la PPE 2021, un projet associé de DPE qui devrait prendre en compte des évolutions majeures, en partie annoncées mais non confirmées : - Un indicateur climatique prépondérant, émissions de CO2 annuelles par m2. Il doit être inférieur d’au moins un facteur 3 aux émissions d’un chauffage gaz.
- Un niveau raisonnable des émissions de CO2 du chauffage électrique (la proposition médiatisée de 79 g/kWh semble raisonnable),
- Un indicateur de performances énergétiques exprimé en énergie finale, seule indication compréhensible par le propriétaire, comparable à ses consommations réelles et donnant les impulsions utiles au lancement de travaux d’optimisation énergétique.
- L’introduction dans l’étiquette énergétique de l’indicateur énergie finale à la place de l’indicateur énergie primaire (ce dernier restant requis dans le DPE, et non dans l’étiquette, en conformité avec la réglementation européenne).
LA RENOVATION EST UN SECTEUR ESSENTIEL : NOUS N’AVONS PAS LE MILIEU ARTISANAL ET TPE ADAPTE
La rénovation dans le bâti ancien correspond à une multitude de petits chantiers faisant appel à un artisanat ou à des TPE qui doivent considérablement monter en gamme. L’enquête TREMI de l’ADEME montre que les rénovations ont des résultats énergétiques très insatisfaisants : urgence de formations qualifiantes dans un secteur de la rénovation trop émietté (moins de 4 personnes par entreprise en moyenne), et de mise en place d’un réseau de bureaux d’étude adaptés. Le développement de l’autoproduction d’électricité sur les logements, coûteuse pour la collectivité et destructrice de la péréquation n’a pas d’intérêt et restera très coûteuse.
Jean-Pierre Pervès 2
QUE VA COÛTER LA PPE : NUL NE LE SAIT ET LA PRÉSENTATION QUI EN EST FAITE EST ILLISIBLE ET TROMPEUSE
QUE NOUS APPREND L’ANALYSE DU COÛT DU SECTEUR DE ELECTRICITÉ
Il est intéressant d’examiner en premier lieu le programme le plus
emblématique de la transition énergétique, celui du développement des
nouvelles énergies renouvelables électriques, le solaire photovoltaïque
et l’éolien. La PPE (pages 273 à 275) donne les chiffres pour
l’ensemble du programme jusqu’à 2028. Leur soutien, par des taxes,
représentait déjà 30 milliards en 2018 et les engagements
supplémentaires, déjà pris et à venir jusqu’en 2028 selon la PPE,
devraient représenter en 2035 environ 90 milliards de plus, soit un total
de 120 milliards €. Et on continuera à les payer jusqu’en 2048.
UN BON INVESTISSEMENT POUR LE CLIMAT/ BIEN SUR QUE NON
Pour quelle quantité de CO2 évitée ? L’examen du bilan annuel 2019 de
RTE montre que de 2014 à 2019 inclus les émissions de CO2 du secteur ont
évolué autour de 20 millions de tonnes par an (19,7 en 2019 et variation
de 16 à 28 millions de tonnes selon les années sur la période). Sur les
15 prochaines années il est peu probable qu’un gain de 10 millions de
tonnes par an puisse être atteint car le charbon est déjà pratiquement
à l’arrêt et la baisse du nucléaire de 2025 à 2035 devrait provoquer
une augmentation de l’usage du gaz.
Le résultat est clair (voir figure 19), nous allons payer sous forme de
taxes entre 2019 et 2035 environ 90 milliards pour les seuls éolien et
solaire opérationnels en 2028, pour un gain CO2 qui sera très
probablement sensiblement inférieur à 10 millions de tonnes par an, soit
moins de 170 millions de tonnes sur 17 ans. Le coût de la tonne de CO2 sur
cette période sera donc supérieur, voire nettement supérieur à 530 €
par tonne de CO2 évitée, chiffre à comparer à la valeur de la taxe
actuelle de 44.6 € par tonne, soit près de 12 fois inférieure. Il est
temps d’arrêter cette gabegie.
QU’AURAIT-ON PU FAIRE AVEC CET ARGENT QUI SERA GASPILLE ?
Avec les 120 milliards attribués au solaire et à l’éolien depuis 2006,
et en accordant une subvention représentant la moitié des 25.000 € de
travaux nécessaires pour décarboner une maison chauffée au fioul ou au
gaz et en améliorer significativement les performances énergétiques, ce
sont près de 10 millions de logements émetteurs de CO2 qui auraient pu
être radicalement transformés du point de vue climatique d’ici 2035 (en
2017 il y avait 3,5 millions de logements chauffés au fioul et 11,7 au
gaz). Le gain CO2 aurait été environ 4 à 5 fois plus élevé pour le
pays par € de subvention.
Ceci montre clairement, ce qu’a bien confirmé la Commission d’enquête
parlementaire sur le financement des énergies renouvelables (juin 2019),
que le déploiement de ces deux électricités intermittentes n’avait pas
pour objet la lutte contre le changement climatique.
UNE PRÉSENTATION DANS LA PPE QUI RESSEMBLE A UN ENFUMAGE
L’analyse de l’impact économique global de la transition énergétique
présentée dans la PPE est encore plus troublante, voire impossible pour
le citoyen auquel on demande un avis. Le rapport s’appuie sur une «
approche macroéconomique hybride », multi-sectorielle, qui mélange tous
les facteurs pour qu’on ne puisse pas avoir une idée claire de
l’impact économique de la transition. Elle intègre des « signaux prix
fictifs », qui représentent des mesures réglementaires et budgétaires.
Les rédacteurs ajoutent que les résultats peuvent être optimistes et que
cet artéfact de modélisation comporte d’importantes limites quand on ne
sait pas ce qu’on pourra faire politiquement ! Comprenne qui pourra.
Formidable bien sûr car ils concluent bravement : on créera 440.000
emplois (où ? on importe l’essentiel du matériel), et le pouvoir
d’achat des ménages augmentera de 2,2 % (grâce aux taxes bien sûr).
Dans la réalité quotidienne, quoi qu’en disent les modèles, il a fallu
fort logiquement attribuer en 2019 un chèque énergie à 2,2 millions de
ménages supplémentaires, en situation de précarité énergétique,
(coût total du programme 850 millions) ! Et depuis 2006 le prix de
l’électricité pour les ménages a augmenté d’environ 30 % en euros
constants (50 % en € courants) ;
Mais bien sûr tout va changer nous promet-on car, dès 2023, les prix de
vente de l’éolien onshore, offshore et du photovoltaïque vont
s’établir à environ 40 €/MWh (p 269) alors qu’en 2020, d’après
la CRE, l’éolien à terre sera payé par EDF 91 €/MWh et le solaire
288 €/MWh (et le futur offshore environ 200). Miracle ou foi du
charbonnier.
CONCLUSION
Ce que ne fait pas le projet de PPE : dire aux français ce que cela va
leur coûter en 2023 ou 2028. La Commission d’enquête parlementaire, en
juin dernier, a échoué dans sa recherche du coût de la transition
énergétique, malgré son pouvoir régalien. Les coûts sont bien cachés
pour ne pas faire peur au citoyen. Mais, bien sûr, 2050 sera paradisiaque
selon l’ADEME et les ministres successifs. Le discours, idéologique pour
les uns, politique ou électoraliste pour les autres, est construit pour
culpabiliser le citoyen en lui faisant croire que ce sera gratuit, voire
bénéficiaire. Lui seul sera coupable d’un échec qui s’annonce avec
une PPE 2021 qui n’a pas tenu compte de l’expérience des années
passées. La France est fragile, pèse très peu sur le climat mondial (1
à 1.6 % selon le mode de calcul), nous savons que cela va coûter cher.
C’est pourquoi une politique climatique et économique pragmatique
devrait s’imposer, optimisée pour le climat, et non orientée vers des
gadgets coûteux.
Jean-Pierre Pervès 3
2)
PPE : une machinerie à tirer dans les coins qui dégradera le bilan
carbone de la France
Malgré les priorités affichées dans la « synthèse du projet PPE » qui vient d’être rendue
publique, le projet semble ne tenir aucun compte du retour d’expérience de la PPE 2018. Celle-
ci affichait le même objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre mais les pouvoirs
publics ont finalement consacré 75% du budget de la transition énergétique à subventionner des
énergies renouvelables électriques au lieu de s’attaquer aux plus gros émetteurs : la mobilité et
le résidentiel-tertiaire. Résultat : la France ne tient pas les objectifs découlant de l’accord de
Paris signé fin 2015.
Or remplacer de l’électronucléaire par de l’éolien et du photovoltaïque n’a aucun effet
sur les émissions. Pire, en l’absence de systèmes de stockage qu’on ne verra pas avant
longtemps déployés à l’échelle requise, un développement massif de ces technologies
parallèlement à une forte réduction de la part de l’électronucléaire ne peut qu’entraîner une
hausse sensible des émissions. Il faudra bien compenser la variabilité par des centrales à flamme
(cf. les scénarios de l’ANCRE) que celles-ci soient construites sur notre sol ou déjà
opérationnelles chez nos voisins européens.
Outre les conséquences négatives du point de vue climatique, porter dans le mix
électrique la part de l’énergie provenant des renouvelables à 33% tout en réduisant à 50% celle
du nucléaire dans les délais annoncés a des répercussions économiques sérieuses : pertes de
compétences et d’emplois dans l’industrie nucléaire ; nécessité d’importer les aérogénérateurs
et les panneaux solaires ; surcapacités liées à l’intermittence (cf. l’exemple allemand) entrainant
un surdimensionnement des réseaux de transport. Cette transformation sera très coûteuse au
détriment d’actions a priori plus efficaces dans les domaines du transport et du bâtiment.
Est-il vraiment nécessaire de prolonger les errements de la précédente PPE ?
Sur un plan plus général, le projet de PPE affiche un objectif venu tout droit de la
LTECV de 2015 : réduire la consommation finale d’énergie de 20% d’ici 2030. C’est
totalement irréaliste. En raison de la corrélation observée entre consommation d’énergie et PIB,
cela signifierait d’aller vers une décroissance imposée au moyen de sévères mesures de
restrictions qu’on voit mal la société supporter sans réagir.
Jean-Louis Bobin
3)
Tenir l’objectif COP21 de la France : réduire de 40% entre 1990 et 2030 nos émissions de gaz à effet de serre, le grand oublié du projet PPE
Le projet de PPE soumis à consultation s’affirme comme compatible avec une stratégie visant la neutralité carbone pour 2050, mais ignore l’échéance 2030. Il est étonnant qu’il ne fasse aucune référence à la dure réalité de la stagnation des émissions françaises tout en citant pourtant l’accord de Paris de 2015 :
« L’accord international élaboré sous présidence française traite, de façon équilibrée, de l’atténuation – c’est-à dire des efforts de baisse des émissions de gaz à effet de serre – et de l’adaptation des sociétés aux dérèglements climatiques déjà existants. »
Pour observer les tendances de nos émissions, il convient de lire le bilan 2018 du CITEPA qui décrit une croissance des émissions françaises, hors séquestration, de 2,1% entre 2014 et 2017, compensée par une baisse de 4% en 2018, année chaude comme 2014.
Nous atteignions donc en 2018, avec moins 20% sur 1990, la moitié de l’objectif 2030, mais devons constater que depuis que la désindustrialisation liée à la crise de 2008 a été enrayée, notre tendance actuelle de baisse, telle qu’elle résulte des résultats de la période 2014 -2018, ne serait que de 2% en 4 ans, ce qui nous conduirait à moins 26% pour 2030, très loin de l’engagement solennel de la France fait en 2015, soit moins 40% pour en 2030.
Ce projet de PPE met en avant surtout une volonté de baisser fortement la consommation d’énergie finale définie par le tableau suivant :
Objectifs de réduction de la consommation finale d’énergie et mesures
2017 2023 2028
Consommation finale d’énergie (TWh) 1634 1525 1378
% de réduction par rapport à 2012 0,9% 7,6% 16,5%
Ainsi, à partir du constat d’une quasi stabilité de la consommation d’énergie finale de la France depuis 2010 résultant d‘une productivité annuelle énergétique de 1,4%, compensée par une croissance annuelle de celui-ci du même ordre, l’objectif du projet PPE décrète un doublement soudain de cette productivité énergétique obéissant à sa promulgation, bien qu’obtenue par les mêmes incitations et politiques que celles du passé récent. Comment un observateur attentif aux réalités des statistiques de l’énergie et des émissions dont nous disposons pour l’Europe et notre pays pourrait croire à la vraisemblance de ces prévisions dont l’atteinte supposerait un engagement de la France dans le déclinisme ?
Il est donc clair qu’un effort important de la France lui permettant de renouer d’ici 2030 avec des progrès sensibles de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre passerait par une substitution forte d’énergies décarbonées aux énergies fossiles, donc par une croissance forte de notre production électrique décarbonée et de la chaleur renouvelable. C’est ce que reconnait dans un article récent la DGEC prévoyant, en cohérence avec un objectif de neutralité carbone pour la France, une production de 650TWh/an d’électricité , soit plus 25% que celle de 2018.
Or nous constatons que l’essentiel des contributions publiques sont consacrées aux renouvelables électriques, sept milliards d’euro par an, (A comparer aux 50 Million/an du plan vélo) dont le seul intérêt serait d’atteindre pour 2035 le 50% de nucléaire, sans aucun bénéfice climatique ni financier comme le reconnait le projet de décret :
« • Pour répondre à la demande d’électricité, en France comme en Europe, l’investissement dans la prolongation de l’exploitation des réacteurs est moins coûteux que l’investissement dans de nouvelles capacités. Tant que des débouchés existent et qu’il n’y a pas de moyens surcapacitaires dont le coût de production est supérieur au prix de marché à l’exportation, ce scénario est le plus avantageux au plan économique pour les Français.
• Ce scénario permet de faire bénéficier le mix électrique français et européen d’une production de base décarbonée, ce qui permet de diminuer les émissions de CO2 européennes en se substituant à une production électrique plus carbonée. »
Comment expliquer alors l’insistance avec laquelle le projet de PPE insiste sur l’impératif de fermetures anticipées de 16 réacteurs jugés sûrs par l’ASN produisant à des prix compétitifs une électricité décarbonée ?
Conclusion :
Le citoyen motivé par un succès réel, non en paroles et règlements, des politiques climatiques de la France lui permettant d’être au rendez- vous COP21 de 2030 pose à Madame Elisabeth Borne Ministre de la Transition écologique et de la croissance Verte la question suivante :
Que choisissez vous, l’honneur pour la France, et vous-même, d’un succès climatique en 2030, ou une réduction des capacités du nucléaire motivée par des impératifs purement politiques ?
Jacques Peter 12/02/2020
4)
Contribution de Henri Prévot en réponse à la consultation sur la PPE, en 2020
Que l’Etat fixe l’objectif (la baisse de CO2), donne le « la » (un critère de coût), et crée un cadre permettant d’agir.
1- La PPE prévoit un fort développement des réseaux de chaleur qui seront en partie alimentés par de la biomasse. La meilleure façon de mobiliser les bois est de relancer la sylviculture pour transformer ou améliorer des forêts peu productives. Or la sylviculture est entravée par l’absence de moyens de financement adaptés à l’investissement sylvicole. Cet investissement a besoin d’un prêt de longue durée, à paiement des intérêts et remboursement différés et garantis contre les risques multiformes. Or la transformation d’un peuplement peu productif en une forêt produisant du bois d’œuvre permet d’éviter tellement d’émissions de CO2 que la valeur du CO2 suffirait à elle seule à la financer intégralement. C’est pourquoi il est de la responsabilité de l’Etat de mettre en place non pas une subvention mais un prêt adapté à la forêt. Ce dispositif est décrit dans une note publiée par Terra Nova : L’économie de la forêt : la belle au bois dormant.
2- La PPE, dans sa première phase, prévoit de réduire la consommation des « passoires thermiques ». Il faudra éviter de faire sur ces bâtiments des dépenses qui conduiraient à un coût du « MWh évité » trop élevé. Il serait inutilement coûteux de les faire passer en classe B du DPE. Il suffit généralement de les faire passer en classe D et de les équiper de pompes à chaleur.
3- Il faudrait que l’Etat fixe un critère de coût permettant de distinguer ce qui est utile du point de vue de la société et ce qui serait inutilement coûteux. Ce critère pourrait se traduire par un niveau de prix de référence de l’énergie fossile : une décision prise pour éviter la consommation d’énergie fossile est intéressante du point de vue de la société si elle s’avère bénéficiaire supposant que le prix de l’énergie fossile est égal au prix de référence. Cette valeur de référence, qui ne dépendrait pas du prix du pétrole, servirait de guide aux investissements – un guide qui nous fait défaut. A titre illustratif, pour atteindre les objectifs d’émission de CO2 de la PPE, il semble inutile de faire des travaux qui ne seraient pas intéressants si le prix de l’énergie fossile était de 140 €/MWh. Voir sur http://www.hprevot.fr
4- Parmi les objectifs de la loi, il en est un qui domine : diminuer les émissions de CO2.
Pourquoi limiter à 50 % la place du nucléaire alors que tout le monde s’accorde pour constater que le prolongement de la durée de vie des réacteurs nucléaires existants, sous réserve de l’accord de l’ASN, est moins coûteux que leur remplacement par des éoliennes ou du photovoltaïque ?
Henri Prévot
5)
AVIS SUR LES OBJECTIFS DE LA PPE
La PPE fixe les priorités d’actions des pouvoirs publics dans le domaine de l’énergie afin d’atteindre les objectifs fixés par la loi :
- réduire les émissions de gaz à effet de serre de 40 % entre 1990 et 2030 ;
OK, pour tenir cet objectif difficile, il faut choisir les moyens les plus efficaces, donc :
- renoncer à la mesure contradictoire 4.
- Renoncer à la mesure peu efficace et coûteuse 3.
- réduire fortement la consommation finale d’énergie (-20 % en 2030) et en particulier la consommation d’énergies fossiles (-40 % en 2030) ;.
- n’a d’intérêt que par une décroissance mondiale coordonnée, ce qui respire l’utopie
- fossile =80% de l’énergie, 40% de 80% = 32% > 20% qui devient inutile
- porter la part des énergies renouvelables à 33 % de la consommation finale brute d’énergie en 2030 ;
– mesure idéologique sympathique au premier abord, mais simpliste, qui à l’étude se révèle peu efficace et coûteuse compte tenu de la faible densité énergétique de ces filières (coût, surface occupée, dispersion), de leur intermittence incontrôlable qui demande le soutien d’un parc pilotable fossile (coût, climat) ou nucléaire. - réduire la part du nucléaire dans la production d’électricité à 50 % à l’horizon 2035.
- Erreur de jugement témoignant de manque de culture scientifique des dirigeants politiques et de la faiblesse de la démocratie face à ce problème.
- En totale contradiction avec la lutte contre le dérèglement climatique puisque l’électricité nucléaire est le moyen le plus puissant de le freiner.
- Si cette PPE est réalisée, et si, comme on peut raisonnablement le penser, compte tenu des progrès en sûreté des réacteurs récents, l’accidentologie statistique du nucléaire mondial continue à démontrer sur le demi-siècle en cours que cette filière énergétique est celle qui a le moindre impact sur la santé publique qu’elle a déjà démontré sur le demi-siècle passé, l’histoire racontera en 2050 ce dérapage de la France.
Gilbert Ruelle
6)
Commentaire PPE n° 1
Critère de sécurité d’approvisionnement électrique : dangereux car dépassé…
L’article D. 141-12-6 du code de l’énergie fixe le critère de défaillance du système électrique à « une durée moyenne de défaillance annuelle de trois heures pour des raisons de déséquilibre entre l’offre et la demande d’électricité ». Le code de l’énergie ne définit cependant pas explicitement ce que recouvre la notion de « défaillance ».
Et c’est là que le bât blesse, car un paramètre essentiel manque : la « profondeur » de la défaillance. En l’état actuel des choses le critère ne distingue pas la coupure d’un seul client domestique et celle d’une région française entière !!! Le rapport CGEDD-CGE de 2018 a identifié cette faille, confirmée par RTE dans son Bilan prévisionnel 2017 :
« Le nombre d’heures moyen de défaillance […] constitue une information particulièrement imparfaite […] Des différences considérables peuvent exister, par exemple sur la profondeur de la défaillance (c’est-à-dire sur le nombre de consommateurs concernés par la défaillance) alors même que le nombre d’heures moyen de défaillance demeure identique (P 137/424) […] Ceci peut être mis en perspective par rapport au critère de sécurité d’approvisionnement actuel (un délestage d’une heure affectant quelques consommateurs et un délestage de la même durée portant sur un nombre significatif de consommateurs sont comptabilisés de la même façon) » (P140/424).
Les pouvoirs publics sont donc amenés à prendre leurs décisions sur une base trompeuse dont ils ignorent les conséquences réelles…
Pourquoi ce critère ne fonctionne-t-il plus ? Il a été historiquement élaboré lorsque le réseau n’était alimenté que par des machines de production pilotables. Le risque était alors conventionnellement limité à la défaillance fortuite de la machine la plus puissante du réseau, soit en France moins de 1,5 GW et les mesures palliatives (réserves primaires, secondaires et éventuellement tertiaires) étaient dimensionnées en conséquence.
L’introduction massive de moyens intermittents éoliens et photovoltaïques change complètement la nature du risque qui porte dorénavant sur les énergies primaires du soleil et du vent elles-mêmes qui peuvent faire massivement défaut sur la quasi-totalité du territoire. Ce défaut de mode commun se manifeste quelles que soient les puissances installées (dizaines à centaines de GW !) la production photovoltaïque étant nulle la nuit et la production éolienne pouvant chuter à quelques % de sa puissance installée par manque de vent : selon les statistiques de Rte, la production éolienne chute à moins de 10 % durant 10 % du temps soit 36 jours par an en moyenne, dont le quart (9 jours) se situe, toujours statistiquement, pendant l’hiver lorsque la consommation est au plus haut.
A contrario, cela signifie que la production éolienne a 90 % de chances d’être supérieure à 10 % et la combinaison de cette probabilité avec celle d’avoir une journée de grand froid est suffisamment faible selon Rte pour respecter le critère officiel des 3 heures par an. Sauf que la profondeur de la défaillance n’est pas définie et se situe alors entre 10 % et 0,5 % (valeur minimale observée) de la puissance installée éolienne, ce qui conduit à des réalités possibles très différentes : avec environ 16 GW actuellement installés, la profondeur de la défaillance se situe alors entre environ 1,6 GW et pratiquement 0 !
Ce qui revient à dire que l’application du critère des 3 heures conduit littéralement à « jouer aux dés » cet écart qui n’est déjà pas négligeable en période de consommation tendue et va croître et embellir avec la croissance de la puissance éolienne installée. On notera que les quatre GRT (gestionnaires de réseau) allemands, instruits par le long retour d’expérience de leurs très grands parcs éoliens à terre et en mer (plus de 60 GW actuellement) prennent en compte dans leurs études de sécurité une puissance minimale de 1 % seulement de la puissance éolienne installée (y compris en mer) soit 0,6 GW… Là où le critère français actuel des 3 heures conduirait à 6 GW ! Valeur totalement démentie par les faits observés en Allemagne…
Il est donc urgent de s’interroger en profondeur sur notre critère français et de l’adapter au risque de manque d’énergie primaire du vent généralisé au territoire qui conduit à des défaillances dont la profondeur va croître avec la montée en puissance de l’électricité éolienne et plus généralement intermittente si l’on y ajoute les défaillances du photovoltaïque par manque de soleil en journée… Pour ne pas mettre la France dans le noir !
Commentaire PPE n° 2
Biomasse : la grande illusion… ?
Le projet de PPE indique : « de l’ordre de 400 à 450 TWh de ressources brutes en biomasse pourraient être mobilisées à l’horizon 2050 (à comparer à 180 TWh en 2016) ». Autrement dit, on multiplierait par 2,5 à 2,8 la mobilisation actuelle de la ressource en biomasse.
Quatre interrogations : le réalisme de la prévision ; l’efficacité de décarbonation de la biomasse ; la fragilité de la ressource en biomasse ; les coûts d’utilisation de la biomasse.
- Réalisme de la prévision : on peut en douter sérieusement eu égard aux limites du renouvellement annuel de la biomasse, qui doit rester au maximum naturel pour être durable. Sauf à cultiver spécialement des plantes à but énergétique, ce qui impliquerait l’usage de terres disponibles, d’intrants de culture éventuels et des dépenses de combustibles pour l’agriculture et les transports. Dont les distances doivent en outre être très courtes pour que l’opération ait un sens.
- Efficacité des réductions des émissions de CO2 : la biomasse n’est réellement efficace que si son utilisation, qui émet du CO2, est très rapidement compensée par une absorption équivalente par la croissance des plantes. Si ce n’est pas le cas, l’effet sur le climat est transitoirement néfaste. De plus, les transformations de la biomasse en combustibles gazeux et surtout liquides présentent des gains très variables en termes de réduction des émissions de CO2 par rapport à leurs équivalents fossiles : négatifs pour la plupart des biodiesels (ce qui est un comble !), de l’ordre de 50 % pour le bioéthanol. Ce n’est qu’avec les biocarburants de 2ème génération que l’on peut espérer atteindre des gains nettement plus importants, dont certains pourraient approcher les 90 % voire plus.
En un mot, l’efficacité globale de la biomasse en termes de réduction d’émissions n’est pas toujours aussi importante qu’on pourrait l’espérer, loin s’en faut. Ce qui ne condamne évidemment pas ses usages mais implique de sélectionner les plus efficaces, parmi lesquels le bois énergie pour faire de la chaleur est l’un des plus pertinents. À condition de ne pas le transporter sur de longues distances, ce qui le limite aux usages locaux. - Fragilité de la ressource : cette dernière pourrait être impactée par le changement climatique, avec des risques naturels accrus : sècheresses, attaques massives de parasites, tempêtes, etc. voire giga-incendies amplifiés par les sècheresses. De tels évènements, loin d’être improbables, pourraient avoir des conséquences majeures sur certains massifs forestiers.
- Coûts : sauf pour le bois énergie très bon marché et quelques autres sources, ils sont élevés à très élevés dès lors que des transformations complexes biologiques (biométhane) ou physico-chimiques (carburants de synthèse) sont nécessaires. Ce qui constitue un frein évident à leur développement.
Question, pour conclure : quel est le plan B si les augmentations anticipées dans la PPE (en réalité très ambitieuses) ne sont pas au rendez-vous ? Réponse : un seul autre vecteur sera à l’échelle des besoins : l’électricité (pompes à chaleur voire électricité joule pour le chauffage, électricité directe et hydrogène électrolytique pour la mobilité, etc.). À condition de ne pas brider artificiellement sa production… N’oublions pas qu’une société moderne a un besoin vital de suffisamment d’énergie et pourrait collapser en cas de grave pénurie. Et ne nous trompons pas d’ennemi : une électricité non émettrice de CO2 n’est pas néfaste pour le climat, même si elle doit être raisonnablement et rationnellement économisée, ce qui n’a rien à voir avec l’instauration d’une pénurie qui serait socialement mortifère.
Commentaire PPE n° 3
Les risques de mode commun de la monoculture éolienne et photovoltaïque
Tel le joueur de flute qui, selon la légende de la bonne ville allemande de Hamelin, débarrassa cette dernière de ses rats en les attirant, grâce à sa musique, à la rivière où ils se noyèrent, la Commission européenne a attiré tous les pays d’Europe dans la monoculture exclusive éolienne et photovoltaïque au nom de la défense du climat. Tous les pays succombèrent aveuglément au nom du « bien », la France « en retard » étant montrée du doigt alors même que son secteur électrique était de très loin le moins émetteur de CO2, donc objectivement le plus vertueux de ceux des grands pays européens. Mais ce résultat remarquable tenait à son nucléaire, classé dans la catégorie du « mal »…
Les légendes méritent d’être méditées : les pays européens ne disparaitront pas dans leurs rivières mais se retrouveront dans le noir s’ils continuent leur course folle dans la même voie… Car ce choix exclusif d’éolien et photovoltaïque pour assurer l’avenir de la production d’électricité est porteur de risques de mode commun considérables à l’échelle du continent si on ne conserve pas suffisamment de moyens pilotables de secours, en attendant que des capacités de stockage de masse, capables de stocker une dizaine de jours de consommation hivernale, soit une énergie considérable 15 à 20 TWh 150 à 200 fois supérieure à celle des STEP actuelles, soient disponibles à un coût soutenable. On en est encore extrêmement loin…
Deux phénomènes cumulent leurs effets dans ce risque de mode commun : d’abord, les pays d’Europe de l’Ouest s’inscrivent dans à peu près deux fuseaux horaires seulement, la nuit y est donc très largement concomitante. Ces pays sont donc tous privés d’électricité photovoltaïque en même temps. Ensuite, contrairement à une fiction tenace selon laquelle « il y a toujours du vent quelque part » la réalité est toute autre : les corrélations de vent en Europe de l’Ouest sont statistiquement très fortes, sauf en quelques rares circonstances très minoritaires en durée. La plupart du temps et dans la plupart de ces pays, il y a à peu près partout beaucoup de vent ou il y en a très peu, la raison étant que les régimes de vent sont majoritairement dominés par les dépressions atlantiques. Résultat : la plupart de ces pays peuvent manquer simultanément d’électricité éolienne. D’où un double déficit de production d’électricité durant les longues nuits d’hiver avec très faible vent. Ce, quelles que soient les capacités installées en éolien et photovoltaïque : quelques % d’une grande puissance installée ne donneront jamais qu’une faible puissance (nulle en l’occurrence la nuit pour le photovoltaïque).
Question : que fera-t-on dans ces conditions ? Réponse : aucun pays ne pourra bénéficier du secours des moyens éoliens et photovoltaïques de ses voisins car ils seront tous en déficit profond. Tous devront alors faire fonctionner au maximum leurs moyens pilotables, utilisant en priorité les énergies hydraulique et biomasse, bien sûr, mais comme cela sera très nettement insuffisant, leurs moyens nucléaire et/ou thermiques fossiles, selon les cas. À condition d’en avoir conservé… suffisamment : c’est une question majeure de sécurité !
C’est en ce sens que la fermeture prématurée de nos réacteurs nucléaires, seules sources pilotables d’électricité décarbonée à la grande échelle de puissance nécessaire pour alimenter la France et une partie des pays européens voisins, est un non-sens climatique absolu. Car la seule autre solution sera alors de faire fonctionner massivement des moyens émetteurs de CO2, fonctionnant probablement au gaz fossile car les moyens au charbon les plus émetteurs auront été fermés et d’autre part il n’y aura pas suffisamment de biogaz disponible, ses autres usages étant bien plus pertinents.
Il ne s’agit pas de dire qu’éolien et photovoltaïque n’ont pas de place dans les systèmes électriques, mais que leur intégration systémique doit répondre à une démarche globale prenant en compte plusieurs critères, d’équilibre des réseaux, de sécurité d’alimentation, économiques, etc.
Ce qui n’est pas le cas dans l’Europe actuelle, dont la préoccupation idéologique exclusive se réduit à la sacro-sainte concurrence incarnée par les marchés de l’électricité, censés résoudre comme par magie tous les problèmes… À ceci près qu’elle accepte en même temps que l’électricité éolienne et photovoltaïque soit grassement subventionnée, contrairement aux règles d’une saine concurrence. Ce qui pouvait se comprendre lorsque ces sources d’énergie étaient naissantes, mais ne se justifie plus depuis qu’elles ont atteint leur maturité et compétitivité industrielle, proclamée par leurs promoteurs. Or, le marché de l’électricité étant par nature myope, ces subventions interdisent de facto tout autre investissement dans des moyens de production ou de stockage qui seraient nécessaires pour pallier l’intermittence du vent et du soleil, faute de rentabilité raisonnablement assurée. Ce contexte aux risques montants devrait très clairement conduire à ne pas arrêter prématurément des réacteurs nucléaires capables de garantir la sécurité d’alimentation sans émettre de CO2.
Commentaire PPE n° 4
L’Allemagne, contre-exemple absolu à ne pas imiter !
L’Allemagne est le pays d’Europe qui a poussé le plus loin le recours massif à l’électricité éolienne et photovoltaïque avec une puissance installée qui dépasse actuellement 110 GW (respectivement plus de 60 GW en éolien y compris en mer et plus de 50 GW en photovoltaïque). Ceci sans diminution notable des émissions de CO2 de son secteur électrique : ce parc énorme a en grande partie servi à remplacer la diminution de la production nucléaire, qui va se poursuivre et se terminer d’ici fin 2022. Or, il est évident que remplacer une source non émettrice par une autre n’améliore pas le bilan des émissions. Si bien que l’Allemagne a continué à utiliser fortement ses moyens fonctionnant au lignite et au charbon, dont la décroissance a été modeste ces dernières années.
Les choses vont cependant évoluer dans les années qui viennent sous la pression des partis « verts » qui ont imposé au gouvernement la fermeture de 22 GW de centrales au lignite ou au charbon d’ici 2031, puis des 17 derniers GW d’ici 2038 au plus tard ! Ce qui ne signe pas une performance à imiter en matière de lutte contre le changement climatique, c’est le moins que l’on puisse dire !
Pourtant, l’Allemagne a englouti entre 400 et 500 Mds€ (selon différentes estimations disponibles) dans son Energiewende, essentiellement pour construire son parc éolien et photovoltaïque actuel. Somme considérable financée en majeure partie par les subventions acquittées par les consommateurs au travers de leurs factures d’électricité, dont les kWh domestiques sont près de deux fois plus chers qu’en France ! La moindre des choses dans un pays sensé aurait été de tirer tous les enseignements de cette calamiteuse expérience pour ne pas la reproduire, d’autant plus que la France, avec un endettement égal à 100 % de son PIB n’a absolument pas les moyens de gaspiller autant d’argent.
Or, la France semble n’avoir strictement rien appris ou plutôt rien voulu apprendre de son voisin et s’apprête à l’imiter servilement à un niveau à peine plus modeste selon les objectifs inscrits dans la PPE à l’horizon 2028 : environ 40 GW d’éolien terrestre et en mer et 35 à 45 GW de photovoltaïque. Cela après avoir déjà dépensé ou engagé plus de 120 Mds€ pour construire le parc actuel d’environ 16 GW d’éolien et 9 GW de photovoltaïque, sans compter les coûts de raccordement aux réseaux également payés par les consommateurs via le TURPE sans qu’ils le sachent…
Bien sûr, on nous expliquera savamment que les coûts unitaires des éoliennes et des panneaux photovoltaïques ont beaucoup baissé (ce qui est exact) mais surtout vont continuer à le faire, ce qui n’est rien d’autre qu’une extrapolation hasardeuse… Quand rase-t-on gratis ? On en est encore loin : par exemple, les résultats des derniers appels d’offres publiés le 6 février 2020 pour le photovoltaïque sur bâtiments font apparaitre des prix moyens de l’ordre de plus de 96 €/MWh pour la tranche 100 kWc-500 kWc (en baisse de… 1% par rapport à la dernière période) et de plus de 86 €/MWh pour la fourchette 500 kWc-8 MWc (en retrait de… 0,4%). Prix encore deux fois supérieurs aux prix moyens de marché !
Et surtout, ces prévisions très optimistes extrapolées sur une longue période cachent un fait majeur volontairement occulté car défavorable aux énergies intermittentes et une question sans réponse car gênante pour leurs promoteurs :
- Fait majeur : le coût propre aux « bornes machines » des installations éoliennes et photovoltaïques n’est pas directement comparable à celui des moyens pilotables car les services rendus ne sont pas du tout les mêmes : les sources d’électricité intermittente sont incapables de satisfaire seules la demande, il faut impérativement compléter et secourir leurs manques soit par des moyens pilotables soit par des déstockages d’énergie. Ce qui a évidemment un coût qu’il faut ajouter aux coûts propres aux bornes des machines. Il faut également y ajouter les coûts de raccordements aux réseaux, qui sont très élevés du fait de la multiplication des machines eu égard à leur faible puissance unitaire.
- Question : si les coûts de l’éolien et du photovoltaïque ont tellement baissé, pourquoi faut-il encore les subventionner ? C’est totalement incompréhensible !
Si l’on y ajoute les destructions de paysages naturels ou patrimoniaux dus aux éoliennes qui suscitent des oppositions de plus en plus fortes des populations locales et le quasi-triplement de leur nombre qui serait nécessaire pour atteindre l’objectif annoncé de 40 GW en 2028 dans la PPE, ce dernier apparait comme une folie dévastatrice et ruineuse. Alors que l’objectif conforme à l’atteinte de la neutralité carbone en 2050 impose le strict remplacement des énergies fossiles restantes, charbon et gaz naturel. Sans plus. Aller au-delà n’ayant aucun intérêt pour le climat et constituant un énorme gaspillage financier.
Commentaire PPE n° 5
Réduire la part du nucléaire à 50 % méconnait sa dimension européenne
Le projet de PPE insiste sur les risques de surcapacité en Europe : « En fonction des décisions de nos voisins concernant le développement des énergies renouvelables ou l’arrêt de capacités de production à partir d’énergie fossiles, le système électrique européen pourrait éventuellement se retrouver en surcapacité à l’horizon 2030, justifiant une planification anticipée d’arrêts de réacteurs ».
Curieusement, le risque inverse, celui de sous-capacité, n’est pas évoqué. Pourtant, il est probablement au moins aussi important sous deux aspects :
- La non atteinte des objectifs de la PPE concernant les moyens éoliens et photovoltaïques, compte tenu de la montée très forte des oppositions contre les éoliennes et plus récemment contre les grandes installation photovoltaïques au sol, pourtant les seules capables de produire une électricité réellement compétitive, mais qui nécessitent de très grandes surfaces devenant rares et risquent de conduire à l’artificialisation des sols et la destruction de terres agricoles et naturelles dans certains cas,
- Plus important encore, la sous-capacité des moyens pilotables, dont beaucoup vont être fermés en Europe dans les années à venir (25 GW de nucléaire hors France et plus de 40 GW de moyens au charbon d’ici 2025-2030) alors qu’ils sont indispensables pour deux raisons majeures :
- D’abord pour assurer l’équilibre production-consommation à tout instant, c’est-à-dire la sécurité du réseau, tant qu’on n’aura pas fait la démonstration que cette dernière peut être assurée sans moyens pilotables dotés d’alternateurs, avec seulement les onduleurs électroniques qui couplent au réseau les sources éoliennes et photovoltaïques. On en est pour l’instant aux toutes premières recherches, c’est-à-dire à des années-lumière d’une quelconque certitude en la matière… Ce qui ne permet en aucune façon de faire la moindre projection opérationnelle réaliste en l’état actuel des connaissances.
- Ensuite parce que des études approfondies au niveau européen, confirmées par le retour d’expérience allemand, pays doté de plus de 110 GW d’éolien et de photovoltaïque, montrent clairement qu’avec beaucoup de sources intermittentes, la variabilité globale cumulée [consommation + production intermittente] dépasse de très loin la variabilité de la seule consommation et est extrêmement importante à certains moments, des gradients supérieurs à 20 GW/h et allant jusqu’à 30 GW/h ayant été observés en Allemagne à plusieurs reprises, ce qui implique des compensations à la fois rapides et d’ampleurs majeures.
Seuls deux types de moyens sont susceptibles de compenser de tels gradients : des moyens pilotables suffisamment puissants et manœuvrants (nucléaire et moyens au gaz, les moyens hydrauliques ou à base de biomasse étant trop limités) ou des capacités de stockage/déstockage très importantes, qui excluent totalement les batteries car beaucoup trop coûteuses à ces niveaux de puissance et orientent quasi-obligatoirement vers les gaz combustibles de synthèse (hydrogène électrolytique et méthane obtenu par méthanation de cet hydrogène) seuls capables d’atteindre les tailles industrielles nécessaires grâce à leur déstockage dans des cycles combinés au gaz (CCG) et/ou des turbines à combustion (TAC) qui relèvent de technologies très matures et peuvent être multipliées en tant que de besoin. Seul énorme problème : ce type de stockage/déstockage coûte actuellement extrêmement cher pour deux raisons : il a un rendement global [électricité gaz de synthèse électricité] (« power to gas to power » en anglais) très faible, actuellement de l’ordre de 35 % pour l’hydrogène et de moins de 25 % pour le méthane de synthèse, et il nécessite par ailleurs des investissements importants dont l’amortissement dépend de l’alimentation en électricité des électrolyseurs.
Selon Rte, le coût de production de l’hydrogène électrolytique varie de 3 à 6,7 €/kg selon l’électricité utilisée (base hors pointe ou marginal renouvelable ou nucléaire) ce qui conduit à ≈ 91 à ≈ 203 €/MWh selon le cas pour le gaz hydrogène. Sa transformation en électricité avec un rendement de 60 % et un coût d’amortissement de 20 % pour l’installation de transformation, conduit donc à une électricité qui coûte entre 91/(0,6 x 0,8) ≈ 190 €/MWh et 203/(0,6 x 0,8) ≈ 420 €/MWh !
Si l’on produit ensuite du méthane de synthèse, avec un rendement de 70 % par rapport à l’hydrogène et un coût d’amortissement également de 20 % pour l’installation de transformation en méthane, les coûts ci-dessus deviennent 190/(0,7 x 0,8) ≈ 340 €/MWh et 420/(0,7 X 0,8) ≈ 750 €/MWh !
Soit au mieux, en retenant les bas des fourchettes ≈ 190 €/MWh pour la filière hydrogène et ≈ 340 €/MWh pour la filière méthane. Pour disposer d’une électricité à coût soutenable, il faudrait donc multiplier par 2 les rendements globaux et diviser par 2 les coûts d’investissement (division par un facteur 4 au total). Il y faudra de sérieux progrès en R&D et réductions des coûts industriels pour disposer d’une solution de stockage ayant un modèle économique viable…
En attendant, on dispose d’un parc nucléaire qui fonctionne de façon très sûre, produit massivement de l’électricité décarbonée à 33 €/MWh, est capable d’alimenter la France et une partie de l’Europe grâce à des exportations très importantes. Et l’on s’obstine à vouloir le réduire sans justification rationnelle crédible : en remplacer une partie par des sources intermittentes n’accroit pas la sécurité d’alimentation mais la dégrade du fait des épisodes d’absence de vent et de soleil qui sont critiques pour le réseau !!!
En réalité, on ne pourra se permettre de réduire la part du nucléaire que lorsque l’électricité déstockée en masse à partir d’hydrogène ou de méthane de synthèse aura atteint un coût soutenable. Le faire avant conduirait à des coûts exorbitants, insoutenables pour la collectivité et les consommateurs.
Georges Sapy
6)
Avis du Comité Energie d’Ingénieurs Et Scientifiques de France, par Edouard Freund , le 10 février 2020 à 12h27
Climat : les conditions de la réussite
La France, comme beaucoup de pays d’Europe et du monde, s’éloigne depuis longtemps, des objectifs qu’elle s’est fixée sur les réductions des émissions des gaz à effet de serre. La grande majorité des scientifiques a tiré la sonnette d’alarme depuis plusieurs années sur l’efficacité très insuffisante des mesures prises, voire sur des erreurs fondamentales. Parmi eux, la Société des Ingénieurs Et Scientifiques de France-IESF-avait proposé un plan, fin 2014-début 2015, basé sur des études très approfondies prévoyant les résultats qui seraient atteints si l’on poursuivait l’application des mesures existantes ; aujourd’hui, ces prévisions sont, malheureusement, devenues une réalité, confirmée par les statistiques officielles, consultables si l’on s’en donne la peine.
Mobilité, Bâtiments sont les deux premières émettrices d’émissions en France : les émissions issues de la mobilité augmentent depuis 4 ans ; la mobilité décarbonée se développe très lentement, contrainte par la technologie, les infrastructures et l’économie ; dans l’attente de son développement massif, la chasse au diesel a profité au retour à l’essence, avec des conséquences lourdes sur les émissions, mais aussi sur l’emploi : le diesel émet de 20 à 25% de moins de CO2 que l’essence et pas plus de particules en tout genre pour les véhicules de moins de 8 ans. La sobriété et l’efficacité énergétiques des bâtiments se développent en France à un rythme 3 ou 4 fois inférieur à celui nécessaire pour atteindre les objectifs, bien que ce domaine soit considéré comme une priorité, puisqu’étant la source la plus importante de réduction dans tous les domaines.
L’électricité française était la plus propre des grands pays européens, 10 fois plus que celle de l’Allemagne (*) et aussi l’une des moins chères (**). Elle n’avait besoin d’aucun changement majeur. La disparition des centrales au charbon aurait dû être une priorité. Le développement très volontariste et coûteux des électricités intermittentes augmente les émissions de CO2 de plusieurs façons : leur intermittence nécessite un secours très rapide, qui ne peut être fourni que par des centrales gaz ; il faut s’attendre à un taux de l’ordre de 100G/KWH dans un avenir proche (*). En 2019, il a fallu y avoir recours ainsi qu’à celui du marché d’effacement utilisé quasi complètement, et donc au bord extrême d’un déclenchement majeur ; la RTE, entreprise quasi publique, reconnaît que la sécurité d’approvisionnement est menacée sur plusieurs années. Les électricités intermittentes nécessitent des matériaux très consommateurs d’énergies fossiles, d’autant plus qu’ils viennent essentiellement de pays très carbonés ; leurs émissions n’entrent pas dans les statistiques (*) ; enfin , l’importation importante d’électricité allemande très carbonée, fait à elle seule augmenter de 50 % le bilan carbone de l’électricité consommée en France (*).De plus, la SNBC-Stratégie Nationale Bas Carbone-s’oriente vers une augmentation significative de la production électrique pour 2050, contrairement à la prévision antérieure de stabilité, voire de baisse ; la PPE n’en tient pas compte. Il serait prudent de ne pas continuer à suivre l’exemple de l’Allemagne qui se trouve dans une situation paradoxale :ses émissions restent élevées et ne diminuent que de 1%/an malgré des investissements colossaux, une électricité intermittente très développée, restant la plus carbonée des grands états européens, hors Pologne, prix le plus élevé d’Europe, sécurité menacée, destruction totale des emplois liés aux panneaux photovoltaïques, et en cours sur les éoliennes avec 30.000 emplois perdus en 2019, chiffres officiels, recours massifs à de nouvelles centrales, à gaz, pour remplacer la fermeture du nucléaire prochaine et des centrales au charbon quelques années plus tard ; la Belgique semble s’orienter dans le même sens.
Le plan élaboré par IESF en 2014/2015 se résumait ainsi en 5 points : Priorité à l’efficacité et à la sobriété énergétique ; adaptation du nucléaire à l’évolution des besoins sans intervention législative ; développement des énergies décarbonées non intermittentes, dont biomasse ; diminution drastique des subventions aux énergies intermittentes ; développement de la recherche et de l’innovation dans tous les domaines de l’énergie, y compris dans celui des électricités intermittentes et leurs conséquences, dont stockage de l’électricité nécessaires pour atteindre un niveau concurrentiel.
Remarques :
– IESF est très soucieuse de l’industrialisation de la France. L’expérience actuelle montre que celle-ci peut exporter son savoir-faire acquis récemment dans les électricités intermittentes. Il faut donc continuer à le faire. Cependant, il ne faudrait pas suivre l’exemple suivant : Liten a mis au point des cellules photovoltaïques de haut rendement ; un projet industriel, soutenu par l’Europe devait se construire en France dans la région lyonnaise ; or il semble devoirs se faire à Catane, avec l’aide de l’Europe… L’industrie concernant les énergies nouvelles ne devraient pas se limiter en France et à l’étranger au seul montage des installations, se satisfaisant d’importer la quasi-totalité des composants nécessaires. L’industrie nucléaire, de très long terme, est à consolider et à pérenniser d’urgence, pour retrouver une compétence perdue.
– De nombreuses études ont été faites sur le coût du nucléaire et de son maintien, comprenant les frais de démantèlement, de prolongation de durée de vie, de renforcement de sécurité et de remplacement ; elles conduisent à des coûts économiques nettement plus avantageux que leur remplacement par les électricités intermittentes et les conséquences associées (***) ; le nucléaire est plus propre que les électricités intermittentes, le coût marginal lié au combustible très faible, leur durée de vie 3 fois plus longue, le prix final faible.
Conclusion :
Beaucoup de choses ont été engagées et sont irréversibles. Mais il n’est pas trop tard pour diminuer drastiquement les dépenses considérables liées aux électricités intermittentes, dans les domaines de la production électrique, des réseaux, des stockages et des autres coûts induits. Les moyens financiers correspondants seraient affectés aux priorités de la sobriété et de l’efficacité énergétique et des énergies non intermittentes. La réussite viendrait de ces décisions courageuses, qui pourraient s’avérer plus facilement acceptables par l’opinion publique que les dispositions actuelles, si l’on se remémore les signes de mécontentement récents ou actuels qui ont pu être attribués, en dehors de causes non liées à l’énergie, à de petites augmentations de prix ou encore à l’envahissement du paysage dans certains lieux.
PS :
Les modifications décidées pour la version définitive de la PPE nous semblent encore très loin d’assurer la réussite, ce qui ne nous a pas encouragés à les commenter directement. ———–
(*) Emissions de CO2 :
– électricité produite -> France (50g/KWH), Allemagne (500g/KWH)
– émises par les énergies pour la production électrique -> gaz (500g/KWH), charbon (1000g/KWH), biomasse (230g/kWh), nucléaire ou hydraulique ou éolien ou solaire (0g/KWH)
– produites pour la construction, non incluses dans les statistiques lies au taux de marche et non à la puissance installée -> nucléaire (12g/kWH), hydraulique (24g/kWH), éolien (50 à 70g/kWH), solaire (>45g/kWh).
Ces chiffres sont des ordres de grandeur, variables selon les situations, issues d’études scientifiques et notamment du GIEC.<div style= »line-height:0em;clear:both; »> </div>
(**) En Europe, les pays qui ont fortement développé les électricités intermittentes sont ceux qui ont l’électricité la plus chère -> le Danemark vient en tête, devant l’Allemagne avec un prix presque double du prix français, pour le moment.<div style= »line-height:0em;clear:both; »> </div>
(***) Des études très approfondies, non publiques, dont le comité Energie d’IESF a pu prendre connaissance, montrent des écarts de plus de 300 milliards d’Euros sur 30 ans entre des investissements nucléaires au détriment des énergies électriques nouvelles intermittentes. Le grand carénage des réacteurs nucléaires permettrait d’obtenir un coût de production de 33€/KWh pour ceux-ci, nettement plus faible que pour les électricités intermittentes, compte-tenu des coûts associés qu’ils entraînent (réseaux, marchés de capacité et d’effacement, stockages électriques, etc, …).
Comité des ingénieurs
7)
PPE A CONCENTRER SUR LA BAISSE DES COMBUSTIBLES FOSSILES
On ne fait une transition énergétique que pour une nécessité vitale.
La dernière décision remonte sous la Présidence de Georges Pompidou lorsque l’OPEP a décidé de réduire sa production de pétrole et a multiplié par 8 le prix du baril.
A cette époque, la France dépendait à plus de 70 % du pétrole en matière énergétique.
La décision fort intelligente du Gouvernement de Monsieur Pierre Messmer a été de :
1. Demander à EDF de remplacer son parc de production thermique à flammes par un parc électronucléaire ce qui n’induisait aucune autre transformation chez les particuliers,
2. De développer le chauffage électrique dans le résidentiel-tertiaire neuf alors que tout le parc existant était chauffé au fioul ou au charbon,
3. De mettre en place les premières normes d’isolation thermique dans le nouveau résidentiel et le tertiaire.
Les résultats furent à la hauteur des engagements politiques avec le raccordement au réseau électrique de 54 réacteurs entre 1977 et 1990.
Il s’est trouvé qu’avec ses choix, la France a fourni une électricité parmi les moins chères en Europe, électricité qui présente aujourd’hui l’immense avantage d’être décarbonée. Les émissions par habitant sont parmi les moins élevées dans l’UE.
Il est à noter que cette politique initiée sous le mandat de Georges Pompidou a été poursuivie par Valéry Giscard d’Estaing et François Mitterrand.
Il faut de nouveau faire une transition énergétique avec comme objectif principal la réduction de nos émissions de CO2.
La consommation d’énergies finales en 2018 est la suivante :
1. Charbon : 1,4 Mtep,
2. Produits pétroliers : 67 Mtep,
3. Gaz : 30 Mtep
4. Electricité : 37, 4 Mtep
5. Energies renouvelables thermiques : 15 Mtep.
L’électricité en France est quasi totalement décarbonée.
Les émissions de CO2 proviennent pour 95 % des 100 Mtep de consommation de combustibles fossiles.
Il ne nous reste que 30 ans pour arriver à la neutralité carbone en 2050 ce qui est très court.
Nos puits de carbone seront-ils capables d’absorber les émissions consécutives à la combustion de 30 Mtep de combustibles fossiles ? C’est le maximum à espèrer.
La France doit donc réduire de 70 Mtep sa consommation de combustibles fossiles en 30 ans. Sachant que les efforts de réduction sont plus faciles au début qu’à la fin de la période, il faut viser une baisse d’au moins 3 Mtep/an de combustibles fossiles pendant la période couverte par la PPE, soit moins – 24 Mtep à l’horizon 2028. C’est un chiffre considérable. Mais ce serait non seulement un gain substantiel en émissions de CO2 mais aussi un gain sur la balance des paiements.
Ces combustibles fossiles sont utilisés pour le chauffage du résidentiel-tertiaire et la mobilité.
La puissance publique doit donc concentrer tous ses efforts sur la rénovation thermique du résidentiel-tertiaire (y compris les changements de moyens de chauffage) et la mobilité électrique. Bien entendu ces deux opérations entraîneront des économies d’énergies et une augmentation de la consommation d’électricité décarbonée.
Or, s’agissant du résidentiel tertiaire, les moyens financiers consacrés ne sont pas à la hauteur de l’enjeu et il est indispensable d’y ajouter les sommes considérables allouées aux aides aux EnR intermittentes. D’ailleurs les Français, dans leur grande majorité, sont devenus anti-éoliennes terrestres et nos côtes sont défavorables à l’implantation d’éoliennes marines économiques.
Il faut donc abandonner les aides délirantes aux énergies renouvelables électriques intermittentes qui n’entraînent aucun gain de CO2 et l’objectif de 50 % d’électronucléaire qui n’a aucun sens. L’électronucléaire est une chance pour notre pays.
Les unités nucléaires américaines qui ont servi de référence à nos centrales ont toutes obtenu une autorisation d’exploitation jusqu’à 60 ans. Les centrales françaises sont mieux entretenues que les centrales US et sont surveillées par un autorité sans égal sur le plan de la compétence et de la sévérité. Nos unités, sous réserve de l’autorisation de l’ASN, peuvent être exploitées pendant 60 ans.
La PPE doit donc être uniquement centrée sur la baisse de consommation des combustibles fossiles. Abandonnons les objectifs insensés donnés pour l'électricité.
Jean Fluchère
8)
Tout arrêt définitif d’un réacteur doit être précédé de la mise en fonction d’une production décarbonée équivalente en puissance et énergie
par Herve Nifenecker
La présente PPE se situe dans le cadre de la Loi de Transition Energétique pour la croissance verte (LTECV) votée par la précédente législature. Cette loi restera historique par l’article décidant de réduire la part du nucléaire à 50% en 2025. Elle avait été si mal étudiée qu’une des premières décisions prises par le nouveau ministre de la Transition Ecologique et Solidaire Nicolas Hulot, peu suspect d’être partisan de l’énergie nucléaire, fut de retarder l’échéance de la loi de 10 ans. Les débats préparatoires à la LTECV n’avaient pas donné de justification à cette limite de la part du nucléaire. Malheureusement la présente PPE maintient l’objectif sans essayer davantage de le justifier. Ainsi s’explique l’oubli du nucléaire comme méthode de production d’électricité décarbonée dans l’introduction :
« La PPE contribue de manière significative à la baisse des émissions de gaz à effet de serre par ses mesures de réduction des consommations d’énergie, priorisées sur les énergies au plus fort taux de carbone, et par la substitution des énergies fossiles par des énergies renouvelables »
Tout se passe comme si la France devait choisir entre le nucléaire et le réchauffement climatique. En effet, l’importance du nucléaire dans notre production d’électricité explique que les Français émettent 430 kg de CO2 par habitant mais les Allemands 880, les Belges 825, les Américains du Nord 1560, la moyenne mondiale étant de 440. Seuls les Suédois, parmi les membres de l’UE font légèrement mieux que les Français avec 380 kg de CO2 par habitant.
Alors, si l’on se donne le Climat comme objectif prioritaire on ne peut comprendre pourquoi la France s’acharnerait à dégrader les performances de son système de production et de distribution d’électricité. Serait-ce à cause du prix de l’électricité ? En 2014, l’Allemagne fournissait aux particuliers (AIE 2016) un MWh électrique à 327 $ alors que les Français payaient le leur 181 $.
Serait-ce à cause des risques associés au nucléaire ? Ils ont été comparés avec ceux des autres technologies de production d’électricité dans le cadre du programme Externe de l’UE et les résultats ont été publiés par la revue FORBES dans le Tableau ci-dessous
Technique Décès per 1000 TWh produits
Charbon 170000
Pétrole 36000
gaz 4000
Biomasse 24000
Solaire PV 440
Eolien 150
Hydroélectricité 1400
Nucléaire 90
Contrairement à l’hydroélectricité, à l’éolien et à la biomasse le nucléaire n’a pratiquement pas d’impact sur la biodiversité.
La LTECV et la PPE donnent clairement la priorité à la diminution du nucléaire tout en affirmant (pour la galerie?) la nécessité de lutter contre le réchauffement climatique sans évoquer le risque de contradiction entre les deux objectifs.
La présente PPE souligne pourtant, dans le cas de la Bretagne (citation)
« les difficultés économiques rencontrées par les centrales thermiques, ainsi que la nécessité de maintenir en activité une partie significative de ces centrales. Cela ne signifie donc pas que le mécanisme de capacité n’est plus nécessaire, mais au contraire qu’il contribuera à donner aux exploitants l’incitation économique nécessaire pour maintenir les capacités nécessaires pour assurer la sécurité d’approvisionnement et respecter le critère de défaillance. Par ailleurs, ces résultats restent très dépendants de la bonne disponibilité du parc nucléaire. En septembre 2016, EDF a revu ses perspectives de production pour 2017 à 390-400 TWh. Il conviendra d’être vigilant dans les prochains bilans prévisionnels au bilan de la disponibilité moyenne du parc. »
Il suit que, avant d’arrêter définitivement un réacteur nucléaire il faut avoir mis en œuvre une production de remplacement avec la même production et la même capacité de production (assurant que la production sera bien disponible à tout moment si nécessaire). De plus, cette production ne devra pas émettre de CO2, ce qui exclut les centrales utilisant des combustibles fossiles (charbon, gaz ou fioul). L’éolien et le photovoltaïque ne produisant que s’il y a du vent ou du soleil ne peuvent fournir de garantie de fourniture. Une importante capacité de stockage est obligatoire. La PPE reconnaît d’ailleurs ces limitations puisqu’elle recommande, toujours dans le cas breton, (citation)
« Le développement des énergies renouvelables et les économies d’énergie, même mis en œuvre de manière très volontariste comme le prévoit le pacte électrique breton, ne suffisent pas à répondre à la fragilité structurelle de l’alimentation électrique en Bretagne. L’analyse de risques menée sur la disponibilité des différents moyens de production et des ouvrages du réseau de transport a identifié la nécessité d’un nouveau moyen de production, en complément du filet de sécurité, afin de répondre durablement à la fragilité électrique de la Bretagne. A l’issue d’un appel d’offres lancé par l’Etat en 2011 pour une centrale de type cycle combiné à gaz d’une puissance de 450 MW »
Conclusion
La PPE maintient sans analyse critique la proposition de la LTECV de réduire la part du nucléaire dans le Mix français de 75 à 50%. Pour que soient respectées les obligations climatiques de la France, l’équilibre et la stabilité du réseau électrique, la PPE devrait fortement recommander que tout arrêt de réacteur soit précédé par la mise en fonction d’un ensemble de production renouvelable équipé d’un stockage fournissant l’équivalent en énergie et puissance du réacteur en cause.
Hervé Nifenecker
9)
Consultation du public sur le projet révisé de Programmation pluriannuelle de l’énergie
Commentaire déposé par Jean-François Sornein le 18/02/2020 à 12h02
Baisse du nucléaire : mensonges et justifications vaseuses pour un objectif absurde
.
La LTECV prévoit la réduction à 50% de la part du nucléaire dans la production d’électricité. La récente loi climat énergie a retardé de 10 ans l’atteinte de cet objectif, sur le simple constat qu’il n’était pas atteignable dans le délai initialement prévu. Mais la vraie question c’est que cet objectif est absurde. Sur ce point essentiel, le projet de PPE ne peut bien entendu que décliner ce qu’a prévu la loi, il est donc condamné à en reprendre les justifications inconsistantes et paradoxales, appuyées par la pratique inadmissible et condamnable du mensonge par omission.
L’objectif est absurde, puisque le seul vrai problème c’est le réchauffement climatique, le seul remède c’est de réduire nos émissions de GES, et que sur ce plan l’électricité nucléaire fait partie des solutions, et pas des problèmes.
Alors, dans ce projet de PPE, comment le MTES tente-t-il de justifier cet objectif absurde ?
Mensonge par omission n°1 : éviter aussi longtemps que possible de rappeler que l’électricité nucléaire ne rejette pratiquement pas de CO2. Si on ne le sait pas, il ne faut pas compter sur les 44 pages de la synthèse pour nous l’apprendre. Il faut attendre la page 137 du projet lui-même pour découvrir que l’électricité nucléaire ne produit que 12 grammes de CO2 par kWh, en comptant tout le cycle, de la mine d’Uranium aux déchets et au démantèlement (voir plus bas comparatif avec l’éolien et le solaire PV). Une fois cet atout majeur mis dans l’ombre, alors qu’il devrait être présenté comme une réalité physique essentielle, le texte peut aligner des phrases ambiguës comme « Le développement des énergies renouvelables doit permettre de produire plus d’énergies non carbonées à partir de sources présentes sur le territoire et de réduire progressivement la part du nucléaire » (Page 24 de la synthèse). Dans ce contexte de silence sur l’atout majeur du nucléaire et d’ambiguïté entretenue sur le sujet depuis la LTECV, faisant coexister en permanence deux messages qui n’ont rien à voir « il faut réduire les émissions de GES » et « Il faut réduire le nucléaire », il ne faut pas s’étonner des résultats de l’étude BVA du printemps dernier, constatant que 69 % des français considèrent à tort que le nucléaire contribue au dérèglement climatique. En tant que rédacteur de ce projet de PPE, le MTES porte une lourde responsabilité dans le maintien de ce fort niveau d’ignorance du public sur le sujet. De même lorsqu’il s’agit d’informer les 400 citoyens du « G400 » réunis par la CNDP pour le débat public du printemps sur cette même PPE, on leur fournit (annexe 2 de la fiche 3 « Choisir ») le chiffre de 66 g de C02 par kWh pour l’électricité nucléaire (au lieu de 12 !), pour les aider à conclure qu’il vaut mieux faire des éoliennes.
Ensuite, comme on ne peut pas reprocher de rejets GES au nucléaire, il faut trouver un autre argument pour expliquer l’objectif « 50 % » ; ce sera « DIVERSIFIER ». Le vieux dicton « ne pas mettre ses œufs dans le même panier » est ainsi élevé au rang d’orientation stratégique sans qu’aucune étude technico économique n’ait conclu à la pertinence de ce ratio. C’est un peu maigre…
Comment le projet de PPE tente-t-il donc de « vendre » cette diversification ?
Mensonge par omission n°2 : éviter soigneusement de signaler que cette diversification arbitraire ne contribuera en rien à la baisse des émissions de GES. Cette désinformation est coupable. Le texte indique prudemment qu’on va se préoccuper qu’elle soit neutre sur ce plan (et ce n’est pas gagné) …
Evoquer ensuite un argument technique pour le moins discutable : « Un système électrique plus diversifié, s’il réussit à gérer l’intégration d’un volume accru d’énergies renouvelables, peut-être plus résilient à un choc externe comme par exemple une baisse de la capacité de production des réacteurs suite à un incident ou à un défaut générique, qui conduirait à l’indisponibilité de plusieurs réacteurs » (page 153).
La promesse d’une meilleure résilience ! Voilà donc l’argument technique qui devrait nous convaincre ?
D’un côté un retour d’expérience de 40 ans d’électricité nucléaire en France sans blackout technique significatif (le dernier remonte au 19 décembre 1978, hors coupures liées aux tempêtes), et au cours duquel les défauts génériques identifiés ont toujours pu être traités sans incidence sur la sécurité d’approvisionnement.
De l’autre le projet d’un recours massif à la production solaire et éolienne, non pilotable, sans capacité significative de stockage, en prise directe sur le réseau sans aucune adaptation à la consommation.
Et ce projet serait censé améliorer la résilience ? Il faut vraiment avoir le goût du paradoxe ! En matière de « défaut générique conduisant à l’indisponibilité » de tout le parc, pour le solaire c’est toutes les nuits, et pour l’éolien c’est toutes les heures sans vent…En analyse de sûreté, ça s’appelle des « modes communs » et, normalement, on cherche surtout à les éviter, pas à les développer !
En conclusion, si le projet de PPE n’a pas le loisir de changer l’objectif absurde de réduction à 50 % du nucléaire fixé par la loi, il a en revanche le devoir de présenter les éléments techniques honnêtement : non le nucléaire n’émet pas de GES, non sa baisse ne fera rien gagner de ce côté-là, oui sa réduction est un choix idéologique et pas technique. Non l’éolien et le solaire ne vont pas rendre le système plus résilient, oui ils vous coûtent déjà beaucoup et vous coûteront très cher…
Le mensonge par omission est un poison dont le texte de la PPE se rend coupable.
Nota : quid des informations fournies dans le projet de PPE sur les rejets CO2 de l’éolien et du PV ? encore deux mensonges par omission !
Mensonge n°3 : Pour l’éolien, la page 114 donne le chiffre de 12,7 g/kWh avec une référence ADEME. En réalité, la Base Carbone de l’ADEME indique actuellement 14,1 g pour le terrestre et 15,6 g pour l’éolien en mer, mais en précisant bien que ces valeurs ne comprennent pas les phases de démantèlement et de fin de vie des installations, ce que le texte de la PPE se garde bien de préciser.
Mensonge n°4 : Pour le solaire PV, aucun bilan CO2 n’est fourni. On le cherche vainement en bas de la page 119. Il est vrai qu’il ne serait pas très convaincant, avec des panneaux fabriqués au charbon chinois (la Base Carbone ADEME donne une fourchette de 35 à 85 g « du sud au nord et suivant la technologie », toujours sans compter la fin de vie).
Pour mémoire, on a vu plus haut le chiffre de 12 g pour le nucléaire sur l’ensemble du cycle de vie. Dans la Base Carbone ADEME, le nucléaire est à 6 g sans compter la fin de vie.
10)
Pensée énergétique en état de mort cérébrale
Contribution à l’enquête publique menée à propos de la nouvelle PPE
17 02 2020
Une évidence en même temps qu’un pléonasme, nos sociétés modernes « carburent » à l’énergie… pas toujours pour le meilleur, c’est certain.
De plus, la produire (même si le terme est impropre puisqu’il s’agit en fait de lui faire changer de nature) n’est jamais innocent.
Une double raison pour ne pas se tromper quand on engage une transition énergétique et donc symétriquement l’obligation d’une double recherche d’efficacité économique et de moindre mal écologique, à conduire simultanément dans un contexte ou les alternatives se sont notablement réduites du fait de la nouvelle donne climatique.
Alors qu’il faut faire la guerre aux sources fossiles génératrices de CO2 (et en général de pollutions significatives, malgré des progrès réels faits sur ce dernier point, mais qui restent forcément relatifs), la PPE étrécit significativement le nucléaire (avec une première charrette de 14 réacteurs !!) et échoue à justifier ce choix comme le montre, entre autres, la platitude les déclarations des Ministres en charge :
On diminue le nucléaire « parce que nous en avons trop … »
On arrête Fessenheim « parce qu’on a dit qu’on l’arrêtait… »
On tangente ainsi le dégré « zéro » de la pensée énergétique et on manie bien légèrement le devenir d’outils industriels très capitalistiques, mais désormais amortis et donc pleinement profitables que les clients d’EDF avaient intégralement financés et qui gardent aujourd’hui et doublement, leur pertinence au nom des principes économiques et écologiques posés plus haut
La PPE se propose, entre autres de remplacer progressivement le nucléaire par des EnR électriques qui, par nature intermittentes et par manque d’efficacité, ne peuvent aucunement être son substitut, sans qu’on doive recourir massivement à d’autres sources forcément carbonées (puisqu’en France, tout le potentiel hydraulique est déjà équipé depuis longtemps).
Et c’est le gaz, déjà à l’œuvre à grande échelle, en cette période de basse performance historique du nucléaire national, qui sera massivement appelé, structurellement cette fois, pour produire de l’électricité, même si la PPE, ne prévoit pas, en l’état, l’accroissement des capacités de production (les CCgaz), mais imaginer une autre issue est impossible, si on réduit significativement les capacités nucléaires.
Certes on sait un peu mieux prévoir les intermittences, reste qu’il faut néanmoins les compenser, certes on parle de stockage, reste que son prochain avènement à l’échelle et à la dynamique voulues reste un leurre absolu, mais le mythe a la vie dure alors que la confrontation de quelques ordres de grandeur, triviaux, suffit à le mettre à mal.
Multiplier inconsidérément les éoliennes (terrestres et même offshores) comme le prévoit la PPE est une fuite en avant qui ne répond nullement aux besoins du pays et qui, au passage, malgré des efforts de persuasion qui confinent depuis longtemps à la propagande, convainquent de moins en moins de citoyens, de plus en plus enclins à regimber fort au sacrifice de leurs paysages et comprenant de mieux en mieux que les résultats promis (climatiques et économiques) ne viendront jamais via cette martingale.
En France, faut-il le répéter, on ne réduira pas les rejets de CO2 en multipliant les EnR électriques et en réduisant le nucléaire.
Mais brandir l’hydre nucléaire est si commode que contre toute approche rationnelle, une majorité de nos citoyens (parfois les mêmes que ceux, réactifs, cités précédemment) se sont laissés persuader qu’il fallait se séparer de cet ami qui certes, en France, nous éclaire, nous chauffe, nous meut, sans faillir depuis quarante ans, mais qui au final ne nous voudrait pas du bien.
On peut à cet égard présenter toutes les comparaisons et aligner tous les chiffres qui montrent sans ambages un intérêt global du nucléaire pour une société qui le maîtrise, sans même devoir y ajouter la dimension climatique, pourtant une belle cerise sur le gâteau, rien ne semble pouvoir aller contre une méfiance atavique.
Cette PPE renforce cette perception en la réifiant, elle s’affiche efficace et moderne mais rejette ce qui l’est vraiment et promeut sans limite ce qui n’en a que la ruineuse apparence.
10)
L’essentiel a été dit sur les problèmes de fond soulevés par le projet de PPE2019-2028 :
- On affiche la lutte contre le changement climatique comme un mantra et on fait tout le contraire :
alors que l’électricité en France est déjà décarbonée, on subventionne des électricités renouvelables
intermittentes pour arrêter le nucléaire, à grands frais, et compenser l’intermittence par le recours au
charbon et/ou au gaz. - L’argent du contribuable est également gaspillé à mettre en place des lignes coûteuses
d’interconnexion et de surdimensionnement d’un réseau électrique de plus en plus « émietté » par les
sources renouvelables intermittentes, de moins en moins pilotable, et donc instable, lois de la physique
obligent. - Le risque de blackout – dont quasiment personne ne parle – n’a jamais été aussi important et va
croissant au fur et à mesure que croit la part des sources d’électricité non pilotables, en France et dans
toute l’Europe. - Alors que l’électricité en France est déjà décarbonée (nucléaire et hydraulique), une stratégie
simplement rationnelle – de l’élémentaire bon sens – devrait faire porter tous les efforts sur les besoins
d’énergie décarbonées pour les transports et le secteur du bâtiment – là où sont consommées les
combustibles fossiles (charbon, gaz, pétrole). Mesures indispensables pour le climat, c’est aussi se
préparer à la pénurie, annoncée par l’AIE (rapport 2018), dès la prochaine décennie. - La réduction de la consommation finale de 20% d’ici à 2030 est irréaliste et purement idéologique.
Quid de la démographie ? Quid des besoins croissants liés à la nécessité de l’électrification des usages ?
Quid des besoins énergétiques croissants pour faire face aux catastrophes climatiques qui se
profilent ?
L’abandon du nucléaire comme méthode de production d’électricité – le mot « nucléaire » lui-même est
devenu tabou – rendent incohérentes la LTECV et la PPE, et de façon générale toute stratégie de politique
énergétique, si tant est qu’elle existe : - La PPE, annoncée comme « constituant le fondement de l’avenir énergétique de la France » (!) se fait
la prisonnière de l’écologie politicienne. Elle mise sur le vent et le solaire, sans réalisme ni rationalité,
sans courage politique ni réflexion stratégique. En 1973, lors de la guerre du Kippour et du choc
pétrolier qui suivit, un Conseil interministériel avait entériné, dès mars 1974, un vaste programme
nucléaire de treize réacteurs de 900 MW pour garantir la sécurité d’approvisionnement en électricité.
Se demande-t-on pourquoi nos politiques n’avaient pas choisi à l’époque d’ériger des parcs éoliens
dans toute la campagne française ? Etaient-ils plus bêtes que nous ?
➔ La loi de transition énergétique et la PPE lèsent durablement notre pays au mépris de l’avenir
des jeunes générations. - On peut s’interroger aussi sur une certaine éthique politique qui consiste à ignorer le bien commun –
à savoir le besoin de sécurité, le besoin d’énergie, la mutualisation des efforts et la solidarité, sans
parler de l’usage parcimonieux de l’argent public – pour servir une idéologie au mépris de l’esprit de la
République. Dans le contexte énergétique et économique de notre pays, l’argent public devrait
soutenir prioritairement, sinon uniquement, l’électrification des usages dans le bâtiment et dans les
transports. Cela a été dit et redit. Y a-t-il un seul argument pour soutenir le contraire ?
➔ Loin de garantir les missions régaliennes de sécurité et d’approvisionnement énergétique,
l’argent public est mis au service d’une idéologie politicienne, mensongère face aux défis
climatiques, ce qui sera payé fort cher. - Enfin, cette absence de vision se double d’une méconnaissance profonde des enjeux scientifiques et
- technologiques de l’avenir. Plus personne en France ne parle du nucléaire du futur. Or, aucune solution
- de stockage de l’électricité, massivement et sur des durées de plusieurs jours, n’est en vue de façon
- technologiquement réaliste et économiquement raisonnable. Par ailleurs, le nucléaire du futur restera
- encore longtemps celui de la fission. C’est pourquoi, la France devrait marcher à pas redoublés vers les
- technologies de réacteurs à neutrons rapides – dont elle avait le leadership – pour arrêter de gaspiller
- la ressource en uranium, diminuer sa production de déchets et se mettre en mesure de consommer
- les centaines de milliers de tonnes d’uranium qu’elle possède (véritable trésor stratégique lui assurant
- une autonomie énergétique pour des milliers d’années !). Qui en parle ? Qui est capable d’en parler ?
- Sans vision stratégique la France n’a donc plus de recherches sur les réacteurs à neutrons rapides de
- 4
- ème génération ; car sans vision, il n’y a plus de recherche, et réciproquement. Le sujet était
- explicitement mentionné par nos grands devanciers dès la fin des années 1960, qui d’ailleurs l’avaient
- confié au CEA 1
- .
- ➔ En quelques décennies c’est tout un héritage scientifique, technologique et stratégique pour
- notre pays qui est réduit à néant. L’ignorance le dispute à l’oubli et l’abandon, ce dont témoigne
- hélas la LTECV et ce projet de PPE.
- En conclusion :
- Loin d’une Programmation Pluriannuelle de l’Energie, cette PPE s’annonce comme une
- désastreuse PPPE : Programmation de Pénurie et de Paupérisation Energétique.
- On voudrait pouvoir croire que ce débat public ne sera pas jeté aux oubliettes et que les
- nombreux avis étayés, éclairés, ou simplement de bon sens, seront pris en compte afin que
- soit revue la loi LTECV qui fait fausse route et la programmation qui en découle.
- Comment admettre qu’on serait incapables de sortir de ce piège abscons qui bouche l’horizon
- de notre pays entre démantèlement du nucléaire et dérèglement climatique ?
- Chiche ?
CK.
1 Cf. Conseil interministériel restreint du 13 novembre 1969 sous la présidence de Georges Pompidou.